Le groupe Total est (et sera) de plus en plus souvent assigné devant les tribunaux

Le 12 décembre 2019 se tenait au tribunal de grande instance de Nanterre le premier procès en lien avec la loi française du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance (IE n° 313). Les associations demanderesses (dont les Amis de la Terre France et Survie) reprochaient au groupe pétrolier Total l’insuffisance de son plan de vigilance, tant au niveau de la publication que de la mise en œuvre, au sujet d’un projet pétrolier en Ouganda ayant entraîné des déplacements de population. Le jugement a été rendu le 30 janvier dernier. Le tribunal judiciaire (nouvelle appellation depuis le 1er janvier) s’est rangé aux arguments de Total. Pour lui, « le plan de vigilance et son compte-rendu font partie intégrante de la gestion de la société ». L’affaire relève donc de la compétence du tribunal de commerce de Nanterre. Les associations contestent cette décision car, à leurs yeux, le tribunal de commerce est chargé de régler les litiges entre commerçants et non les affaires qui traitent de « graves atteintes aux droits humains et à l’environnement ». Elles envisagent de faire appel.

Deux jours avant cette décision, le 28 janvier, quatorze collectivités et cinq associations ont également assigné Total devant le tribunal judiciaire de Nanterre, également sur la base du devoir de vigilance. Cette fois, les organisations ont opté pour une assignation au fond et elles demandent au tribunal de condamner Total SA à publier, dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir, un nouveau plan de vigilance comportant des mesures listées dans leur dossier de presse. Cette action fait suite à une mise en demeure formulée le 19 juin 2019 et rejetée par la compagnie (IE n° 304). Les demandes vont au-delà d’une simple mise à jour du plan de vigilance du groupe pétrolier. En effet, elles soulignent qu’en l’état, la stratégie adoptée ne permet pas de répondre aux objectifs de l’accord de Paris et elles requièrent une révision de cette stratégie. L’une des questions reste de savoir si le tribunal acceptera, cette fois, de s’immiscer dans la gestion de l’entreprise.