Premières assignations autour de la loi française sur le devoir de vigilance

L’intention du législateur ainsi que celle des personnes et des organisations qui ont soutenu l’intégration dans le droit français de la loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre était clairement d’impliquer les grandes sociétés françaises dans la résorption des atteintes sociales, sociétales et environnementales hors du territoire national et/ou dans leur chaîne d’approvisionnement. Dès lors, il était inévitable que l’effectivité de cette loi soit « testée » et, de fait, il n’est pas étonnant qu’une entreprise aussi emblématique que Total soit « sollicitée ».

Coup sur coup, le groupe a fait l’objet de deux mises en demeure dans le cadre de cet article. La première date du 18 juin. Elle émane de plusieurs ONG et de quatorze collectivités françaises qui estiment que le nouveau plan publié par le groupe en mars dernier (remanié à la suite d’une critique formulée en octobre 2018 à l’encontre de la première version – IE n° 290) ne constitue pas une réponse satisfaisante au risque climatique. La deuxième a été notifiée le 24 juin par les associations françaises Survie et Les Amis de la Terre France, ainsi que par quatre associations ougandaises, qui jugent d’une part, que le plan de l’entreprise pétrolière ne couvre pas les risques prévus par la loi (droits humains, libertés fondamentales, santé et sécurité des personnes, environnement) pour ses activités en Ouganda (voir IE) et, d’autre part, que le projet ougandais de la société a d’ores et déjà entraîné des violations (insuffisance des indemnités de réinstallation des populations, pression sur ces dernières pour qu’elles acceptent les propositions, menace sur le plan environnemental…).

Les deux coalitions menacent d’assigner l’entreprise en justice si aucune amélioration n’est enregistrée d’ici à trois mois. Total doit donc, à tout le moins, démontrer que les risques évoqués par les organisations et les collectivités sont pris en compte dans son plan de vigilance, que le niveau de détail qui est communiqué répond à la législation et que les violations ou risques observés ne résultent pas de failles dans ce plan. Rendez-vous dans quelques mois…