En juin 2016, le journal Le Monde avait révélé que le cimentier franco-suisse LafargeHolcim avait versé de l’argent à l’organisation Etat islamiste pour pouvoir poursuivre ses activités en Syrie (voir IE n° 254). Après avoir, dans un premier temps, nié les faits, la direction avait admis que des transactions avaient été réalisées avec des groupes armés, mais sans qu’ait pu être établi « avec certitude quels étaient les destinataires ultimes des fonds ». Dans son édition du 21 septembre, Le Monde révèle des éléments de l’enquête judicaire en cours résultant de l’audition de neuf responsables de l’entreprise et d’un rapport du Service national de douane judiciaire (SNDJ). Ces éléments attestent que le cimentier a employé un intermédiaire pour négocier avec les groupes armés et que les montants versés représentaient 5 millions de livres syriennes environ par mois pour Daesh (soit quelque 20 000 euros), que la direction française de la société « a validé ces remises de fonds en produisant de fausses pièces comptables » et que le gouvernement français a fortement incité le groupe à rester en Syrie. Quoi qu’il en soit, et en attendant les conclusions définitives de l’enquête, l’affaire pose plus largement la question de la légitimité du financement de groupes violents ou même d’Etats voyous grâce à des activités considérées comme régulières.