LafargeHolcim se forge une durable et solide… mauvaise réputation

Tous les ingrédients sont réunis pour ternir, et pour longtemps, la réputation du cimentier franco-suisse : un leader mondial doté d’une grande visibilité médiatique, des transactions financières avec des groupes armés suspects en Syrie (épicentre des remous internationaux actuels), une candidature pour participer à la construction d’un des ouvrages les plus controversés de ces dernières années (le mur anti-migrants de Donald Trump). En juin 2016, le journal Le Monde avait révélé que LafargeHolcim avait payé des taxes à l’organisation terroriste Etat islamique entre 2013 et 2014 pour permettre à sa cimenterie de Jalabiya (nord-est de la Syrie) de continuer à fonctionner. En septembre de la même année, le ministère de l’Economie avait saisi le parquet de Paris pour de possibles infractions commises par le cimentier (notamment dans le cadre de l’interdiction d’acheter du pétrole en Syrie). En novembre, l’association française Sherpa et l’European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR) avait porté plainte contre le groupe, notamment pour financement du terrorisme et complicité de crimes contre l’humanité. Après avoir démenti ces accusations, le groupe a finalement reconnu dans un communiqué du 2 mars 2017 « que des collaborateurs de l’entreprise auraient réalisé des transactions avec certains groupes armés et avec des tiers visés par des sanctions » tout en indiquant que l’enquête menée en interne n’avait « pu établir avec certitude quels étaient les destinataires ultimes des fonds ». Mais le simple fait d’être mentionné dans le cadre d’un financement d’organisations terroristes expose LafargeHolcim à d’autres actions juridiques, en particulier aux Etats-Unis où cette question n’est pas prise à la légère. Toujours le 2 mars, le quotidien suisse Tages-Anzeiger a révélé que LafargeHolcim était candidat à la construction du mur de 3 000 kilomètres envisagé entre les Etats-Unis et le Mexique. Pour défendre sa position, le président du cimentier, Eric Olsen, juge utile de préciser que son entreprise n’est « pas une organisation politique ». Mais il se pourrait bien que le politique, c’est-à-dire l’ensemble des conditions qui permettent aux individus de vivre ensemble, se rappelle à son bon souvenir et que cette décision suscite des mouvements de désinvestissement financier.