Les députés nigérians demandent au gouvernement de s’opposer aux cessions d’actifs des sociétés pétrolières internationales avant qu’elles aient réglé leurs dégâts environnementaux

L’exploitation des ressources pétrolières au Nigeria est un cas d’école montrant comment elle a contribué à l’exaspération de conflits et de violations des droits humains (guerre du Biafra, exécution de Ken Saro Wiwa et de ses partisans…), au développement de la corruption à grande échelle (Sani Abacha, OPL 245…), à la multiplication de pollutions dévastatrices (delta du Niger), etc. Le plus souvent, l’extraction de l’or noir n’a pas bénéficié aux populations locales, bien au contraire. Depuis quelques mois, les grandes compagnies pétrolières présentes sur place, comme Shell, procèdent à un allègement de leurs actifs onshore dans le pays, laissant derrière elles un désastre écologique.

Le chef de la minorité à l’Assemblée nationale du Nigeria, Kingsley Chinda, a présenté une motion urgente lors de la session du Parlement du 6 février 2025. Dans cette motion, il appelle le gouvernement fédéral à suspendre toutes les demandes de cession d’actifs des compagnies pétrolières internationales, comme Shell et TotalEnergies, jusqu’à ce que ces dernières aient rempli leurs obligations environnementales et sociales envers les communautés du delta du Niger.

Il a rappelé aux députés que la Commission nigériane de réglementation du pétrole (NUPRC) avait récemment rejeté la demande de Shell, invoquant l’incapacité de la société à répondre à sa responsabilité environnementale et les inquiétudes quant à la capacité de l’acheteur, Renaissance Consortium, de gérer dans de bonnes conditions les actifs acquis. Kingsley Chinda a aussi mentionné les cessions passées (vente d’actifs de Nembe à Aiteo, d’ENI/AGIP à Oando…) qui ont laissé les communautés locales aux prises avec des dommages environnementaux non résolus, des marées noires et une instabilité sociale.

Selon lui, approuver les demandes de désinvestissement de Shell ou de TotalEnergies sans résoudre les passifs environnementaux et sociaux porterait atteinte à l’autorité de régulation du Nigeria et transférerait les responsabilités des entreprises à l’État, créant ainsi un précédent dangereux en matière d’impunité environnementale. La motion a été adoptée à l’unanimité.