En mars prochain, le CFIE, éditeur de cette lettre, célébrera ses 30 années d’activité dans la RSE et l’ISR. Pour parler franchement, le vote des eurodéputés du 13 novembre 2025 sur les propositions de simplification des directives sur le devoir de vigilance des entreprises et leurs obligations de reporting en matière de développement durable est l’un des plus importants reculs observés au cours de cette période. Le texte réduit considérablement le champ des sociétés concernées. Les dispositions sur le plan de transition relatif au changement climatique ont été écartées. Les amendements accordent une « large marge de manœuvre » aux entreprises pour établir leurs priorités et déterminer les informations qu’elles jugent significatives. Les références aux parties prenantes sont quasiment absentes du document, sauf en termes vagues. Les entreprises « ne devraient pas chercher à obtenir des informations de leurs partenaires commerciaux ». Le devoir de vigilance et les mesures prises doivent tenir compte « des facteurs de risque pertinents, notamment des facteurs de risque au niveau de l’entreprise », relativisant ainsi la notion de double matérialité. En cas d’incidence grave observée chez un fournisseur, la société peut suspendre ses relations commerciales. Mais si cela entraîne pour elle un préjudice important, elle « ne devrait pas être tenue de suspendre la relation commerciale ». Les eurodéputés demandent explicitement de « veiller à ce que les États membres n’aillent pas au-delà de ce que prévoit la directive », etc. Tous les ingrédients sont réunis pour produire des rapports aseptisés, insipides, voire inutiles. Ces vitrines laisseront peu ou pas de place aux dynamiques de progrès susceptibles d’inverser les tendances générales. Et pourtant, l’expérience et l’observation prouvent qu’on est loin du but. Les invraisemblables pratiques de Shein montrent bien le manque de discernement et l’absence de scrupule qui émaillent encore une partie du monde des affaires, et ce, avec un large assentiment.
