La filière sidérurgique s’apprête-t-elle à effectuer un saut technologique déterminant ?

La sidérurgie contribue directement à environ 7 % de l’ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Dans ce secteur, comme dans de nombreux autres, des initiatives sont prises (maintenances techniques, optimisation des procédés, etc.). Mais elles améliorent à la marge les performances des sites en matière de rejets de GES. Une amélioration notable nécessiterait un saut technologique, et donc des investissements qui peuvent s’avérer considérables. La remarque est importante car, une fois réalisés, ces investissements constitueront une « charge » dont il faudra s’accommoder pendant de nombreuses années. Une annonce du 23 novembre du plus grand producteur de minerai de fer européen, le suédois LKAB, constitue une petite révolution dans le monde de la métallurgie et de la sidérurgie.

La société devrait en effet investir jusqu’à 400 milliards de couronnes (39 milliards d’euros) au cours des 15 à 20 prochaines années pour développer un processus de production sans émissions de GES. Pour son président, Jan Moström, « il s’agit de la plus grande transformation en 130 ans d’histoire de l’entreprise et cela pourrait s’avérer être le plus gros investissement industriel jamais réalisé en Suède ». En 2016, l’énergéticien Vattenfall, l’aciériste SSAB et LKAB ont lancé le projet Hybrit. Ce projet permet de produire des « éponges de fer » en utilisant de l’hydrogène « vert » au lieu du charbon pour éliminer l’oxygène du fer dès la phase de raffinage du minerai. Les aciéries pourront ainsi remplacer les hauts fourneaux par un procédé qui émet de la vapeur d’eau au lieu du CO2, et l’acier sera produit pratiquement sans émissions de carbone. L’impact correspondra à moins de 1 % des rejets de l’industrie sidérurgique mondiale. Mais même s’il n’est pas réaliste de s’attendre à ce que l’ensemble de l’industrie sidérurgique bascule pour adopter cette nouvelle technologie, compte tenu de l’ampleur des investissements dans les hauts fourneaux existants, d’autres sociétés de minerai de fer pourraient à terme reproduire la démarche. En particulier en Australie, en Afrique du Sud et en Amérique latine, où sont localisées les principales sources de minerai de fer dans le monde et qui ont accès à une énergie renouvelable nettement moins chère qu’en Suède.