Une association dresse un panorama des actions de lobbying qui portent sur les directives européennes relatives aux obligations des entreprises en matière de durabilité

Le 23 juin 2025, les représentants des États membres de l’Union européenne ont arrêté le mandat de négociation du Conseil sur la simplification des obligations des entreprises (paquet législatif « omnibus ») relatives à la publication d’informations extra-financières (CSRD) et au devoir de vigilance en matière de durabilité (CS3D). En ce qui concerne la CSRD, le Conseil s’aligne sur les propositions de la Commission. Il relève le seuil des effectifs à 1 000 salariés et exclut les PME cotées du champ d’application de la directive.

Quant à la CS3D, le Conseil propose qu’elle ne s’applique qu’aux entreprises de 5 000 salariés ou plus et dont le chiffre d’affaires net est supérieur à 1,5 milliard d’euros. Par ailleurs, les entreprises ne devraient plus être obligées de dresser une cartographie complète pour identifier et évaluer leurs impacts négatifs réels ou potentiels. Elles devraient simplement mettre l’accent sur les domaines dans lesquels les incidences négatives réelles et potentielles sont les plus susceptibles de se produire.

Le Conseil maintient la proposition de la Commission de limiter les obligations des entreprises au périmètre des sociétés elles-mêmes, à leurs filiales et à leurs sous-traitants de rang 1 (et de ne pas les étendre à toute la chaîne de valeur comme le réclament les acteurs de la société civile, la finance responsable et certaines entreprises), et de baser leurs efforts sur les informations raisonnablement disponibles. Les obligations en matière d’identification et d’évaluation des risques pourront cependant être étendues au-delà des partenaires commerciaux directs en cas d’informations objectives et vérifiables indiquant la possibilité d’incidences négatives. Une clause de réexamen pour une éventuelle extension de ces obligations au-delà du rang 1 est aussi prévue.

Le Conseil reporte également d’un an la date limite de transposition de la CS3D en la fixant au 26 juillet 2028. Désormais, sa présidence va pouvoir entamer des négociations avec le Parlement européen, une fois que ce dernier aura arrêté sa propre position de négociation.

Les travaux menés par l’Union européenne pour rédiger la directive sur la responsabilité élargie des entreprises (reporting et devoir de vigilance) ont été le théâtre d’intenses démarches de lobbying. Le 24 juin, Social LobbyMap, un programme porté par la fondation Eiris, a publié une analyse à propos de ce lobbying exercé sur la CS3D. L’étude a passé en revue les réponses aux consultations et autres formes d’engagement de 88 entreprises et associations professionnelles.

Le document révèle que le secteur financier et les associations professionnelles intersectorielles ont été les catégories d’acteurs les plus opposées à certains aspects de la proposition de directive. Sur les 32 entités financières étudiées, seules 8 d’entre elles ont exprimé un soutien à tous ses aspects, tandis que 17 ont adopté des positions défavorables ou ont clairement exprimé leur opposition. C’est, en particulier, le cas du Nasdaq, de Borsa Italiana, d’Investor AB et de la Fédération bancaire française. De même, 19 des 24 associations professionnelles ont affiché des positions défavorables. Par ailleurs, les associations professionnelles ont été nettement plus opposées à la directive que leurs membres. À l’inverse, des entités telles que l’association des Acteurs de la finance responsable (AFR), les Principes pour l’investissement responsable (PRI) et Aviva Plc se sont largement montrées favorables à la directive.

Un grand nombre d’entités (47) a soutenu l’idée que les entreprises devaient être légalement tenues de mener des activités de diligence raisonnable en matière de droits humains. Mais 16 organisations se sont catégoriquement opposées à cette idée, préférant les mesures volontaires.

En revanche, 32 entités sur 88 ont fait des propositions pour réduire considérablement l’ambition de la directive en ce qui concerne son champ d’application (en excluant, par exemple, des secteurs d’activité entiers ou les petites et moyennes entreprises). Un nombre identique d’entités s’est fortement opposé à l’idée d’inclure des responsabilités directes pour les administrateurs. Enfin, 52 organisations ont déclaré ne pas être favorables ou être opposées à l’introduction d’une dimension judiciaire (responsabilité et indemnisation) dans la directive, et 42 se sont dites non favorables ou opposées à la mise en place de mécanismes de réclamation.