Alors que s’ouvrent les négociations internationales sur le plastique, l’attention doit aussi se porter sur la santé

Un cycle de négociation internationale chasse l’autre. Le 25 novembre 2024 s’est ouverte à Busan (Corée du Sud) la cinquième et dernière session, en principe, du Comité intergouvernemental de négociation (INC5) en vue d’établir un instrument juridiquement contraignant sur la pollution plastique. L’ONU considère que ces matériaux font partie d’une triple menace planétaire : changement climatique, perte de biodiversité et pollution. Le plastique est fabriqué à partir de divers produits chimiques toxiques. Lorsqu’il se décompose en morceaux microscopiques, ces derniers pénètrent dans le corps humain. Ils ont été retrouvés dans le sang, le cerveau, le placenta.

Le projet de texte initial de 70 pages était inapplicable à quelques jours seulement du début des négociations formelles. Aussi, l’ambassadeur de l’Équateur au Royaume-Uni, Luis Vayas Valdivieso, qui préside la réunion des Nations Unies, a élaboré un projet plus court et simplifié appelé « document officieux ». Il laisse les dispositions clés du traité, mais sans texte suggéré.

Les États-Unis sont l’un des principaux producteurs de plastique. Depuis le début des discussions en décembre 2022, l’administration Biden a fait preuve de peu d’ambition pour parvenir à un traité solide. Toutefois, le département d’État a récemment envoyé des signaux indiquant qu’il entendait adopter une position plus volontariste face au problème de la pollution plastique, notamment en se montrant prêt à accepter des dispositions susceptibles de réduire la production de plastique. Mais le retour imminent de Donald Trump, grand supporter des énergies fossiles, à la Maison-Blanche pourrait à nouveau changer la donne. Aussi les défenseurs de l’environnement exhortent-ils l’administration Biden à ne pas baisser les bras et à se saisir avec détermination du sujet lors de cette session.

Il ne suffit pas de parler du plastique comme étant uniquement un problème de déchets. Il convient également de prendre en considération ses impacts sur la santé humaine. Dans un rapport publié le 7 novembre 2024 dans la revue One Earth, des chercheurs ont rassemblé des informations sur les nombreux impacts négatifs du plastique sur la santé humaine.

Lors de leur fabrication, les emballages en plastique, les jouets, les vêtements, les ustensiles de cuisine, les matériaux de construction contiennent presque toujours un cocktail de produits chimiques (plastifiants, retardateurs de flamme, pigments…), qui peuvent représenter jusqu’à 70 % de leur poids. Certains de ces produits chimiques sont connus pour être cancérigènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction et le développement.

Sur plus de 16 000 produits chimiques utilisés dans la fabrication du plastique, plus de 4 200 sont préoccupants, car ils sont persistants, bioaccumulables, mobiles et/ou toxiques. Pour 10 000 autres, les informations sont insuffisantes pour jauger les dangers qu’ils présentent. Les chercheurs s’échinent à comprendre les effets du plastique et de ses additifs chimiques sur notre santé. Mais ces efforts sont considérablement ralentis par l’absence de transparence de l’industrie pétrochimique quant aux produits chimiques contenus dans les plastiques.

Les plastifiants, par exemple, sont ajoutés aux plastiques pour les rendre souples et malléables. Ce sont des perturbateurs endocriniens. Le BPA, les bisphénols et les phtalates sont particulièrement préoccupants. Tout comme les PFAS, connus sous le nom de « produits chimiques éternels », parce qu’ils ne se décomposent ni ne disparaissent jamais. Par ailleurs, les produits en plastique restent une source potentiellement toxique, même après leur élimination. Lorsqu’ils sont incinérés, ils peuvent libérer des plastiques dans l’air et l’environnement sous forme de minuscules particules (liées aux maladies pulmonaires et cardiaques), de métaux lourds, comme le plomb et le mercure, et de dioxines.

De nombreux problèmes peuvent également surgir lors de leur dégradation, soit dans nos habitations au cours de leur utilisation, soit lorsqu’ils sont rejetés dans l’environnement et qu’ils se transforment en microplastiques ou en nanoplastiques. Les microfibres de plastique se détachent des vêtements et des meubles. Les nanoplastiques s’échappent des emballages et des contenants alimentaires (en particulier lorsque nous les soumettons aux micro-ondes). Les microplastiques se retrouvent dans les fruits et légumes que nous consommons, dans l’eau du robinet ou en bouteille, etc.

La manière dont les microplastiques interagissent avec les organes humains ou affectent le fonctionnement de l’organisme reste largement méconnue, car les microplastiques et la santé constituent un nouveau domaine d’étude. Mais compte tenu de la complexité des plastiques, les scientifiques pensent qu’il faudra des années pour identifier les mécanismes précis par lesquels les microplastiques et des milliers d’additifs liés aux plastiques affectent notre santé. C’est pourquoi des chercheurs, des militants et même des États réclament que le cycle de vie complet des plastiques soit réglementé, de l’extraction du pétrole à la création des ingrédients pétrochimiques du plastique et à leur élimination en toute sécurité.