Quand on évoque les violations des droits sociaux dans le textile, on pense immédiatement au Bangladesh et à l’industrie de la mode. Mais cette question touche d’autres secteurs, et notamment les grandes entreprises qui s’approvisionnent en vêtements de travail. Ce sujet est mis en exergue depuis plusieurs années par le CFIE (l’éditeur de cette lettre) à travers sa filiale CFIE-conseil et son étude annuelle sur la transparence des rapports de développement durable. Cette problématique concerne également les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, comme la Turquie ou la Thaïlande, en particulier dans les zones de migration. C’est le cas pour les ouvriers des usines de la ville de Mae Sot (province thaïlandaise de Tak), située à quelques kilomètres de la frontière birmane, où 44 300 travailleurs sont employés dans quelque 430 usines, dont 40 % (selon les données gouvernementales) produisent des vêtements et du textile. La fondation Thomson Reuters y a réalisé une enquête et interrogé vingt-six ouvrières et ouvriers. Tous ont déclaré avoir touché un salaire inférieur au salaire minimum journalier (350 bahts, soit 10,35 euros). Les techniques des employeurs sont « classiques » : prélèvement des coûts du logement, de la nourriture et des permis de travail sur le salaire, non-paiement des heures supplémentaires… Plusieurs travailleurs ont affirmé qu’ils recevaient déjà moins que le salaire minimum avant ces retenues. L’un d’entre eux a indiqué qu’il n’avait reçu que 80 bahts pour une journée de travail de quinze heures et qu’il n’avait bénéficié que d’un jour de congé tous les quinze jours. Les autorités admettent que cette région classée en zone économique spéciale est un « trou noir » où il est difficile d’effectuer des contrôles. Plusieurs des personnes interrogées ont affirmé qu’elles avaient fabriqué des tabliers pour la chaîne de café américaine Starbucks. Cette dernière a déclaré qu’elle prenait au sérieux les conclusions de la fondation et qu’elle allait mener une enquête approfondie.