Honnêtement, on aimerait extraire de nos mémoires cette année 2015. Mais il faut être lucide, le monde n’a pas terminé sa recomposition et les soubresauts qui l’accompagnent vont probablement durer. Sur le plan économique, la redistribution des cartes se poursuit et la compétition internationale pourrait encore se durcir. Les économies développées se ressaisissent légèrement, mais diversement. Les pays émergents, espoirs d’hier, connaissent des fortunes diverses, allant d’un ralentissement préoccupant de la croissance économique pour la Chine, ou même pour l’Indonésie et la Turquie, à une franche récession pour le Brésil et la Russie. La baisse des cours du baril de pétrole et des matières premières déséquilibre sérieusement les finances publiques de certains pays et ébranle des équilibres sociaux déjà précaires.
Parallèlement, on assiste à une montée des communautarismes, à la tentation de se replier sur soi et à des tentatives de la part de certains Etats, sous prétexte de préserver les intérêts nationaux, de maîtriser la liberté d’expression de la presse ou des acteurs de la société civile. Le calendrier électoral de certains pays retiendra également l’attention. En premier lieu, l’élection présidentielle aux Etats-Unis bien entendu (ainsi que la question des dépenses aux organisations politiques), mais aussi les élections législatives iraniennes en février, et russes en septembre. Trois pays qui jouent un rôle déterminant dans la crise qui secoue le Moyen-Orient et, par contrecoup, la plupart des Etats situés dans un large rayon alentour, à travers les mouvements terroristes et les flux migratoires.
Ces éléments constituent une toile de fond qui influe sur la capacité de la communauté internationale à évoluer dans le sens d’un développement durable et équitable. Mais ne passons pas sous silence plusieurs événements qui ont éclairé ce tableau plutôt sombre de l’année écoulée, comme la victoire historique du parti d’Aung San Suu Kyi lors des premières élections générales libres depuis 1960 en Birmanie. Saluons aussi la reconnaissance par la communauté internationale de la « ténacité » de la jeune démocratie tunisienne avec l’attribution du prix Nobel de la paix à quatre organisations reflétant la diversité de la société civile du pays et réjouissons-nous de la fin de l’épidémie due au virus Ebola (annoncée officiellement par l’Organisation mondiale de la santé le 29 décembre dernier), qui a endeuillé pendant plus de deux ans trois pays d’Afrique de l’Ouest en provoquant le décès de quelque 11 300 personnes. Sans oublier l’accord de Paris qui, s’il n’est qu’un point de départ, n’en constitue pas moins un vrai défi dont il importe de se saisir sans tarder.
C’est dans ce contexte que les entreprises devront poursuivre leurs efforts afin de contribuer à une plus juste répartition de la valeur créée et à une préservation des droits, des libertés et des biens communs et individuels. Des conditions nécessaires pour aller vers une plus grande cohésion sociale, mais aussi vers une meilleure intégration des entreprises dans leur milieu. Un rôle qui ne va pas de soi, car il exige de reconstruire une image fortement dégradée auprès d’une opinion défiante, dont une partie cherche, du reste, à s’émanciper de la tutelle des décideurs et du marché. Sans surprise, la question climatique a dominé l’information diffusée par Impact Entreprises au cours de l’année 2015, prépondérance qu’elle devrait conserver en 2016. Mais certains phénomènes continuent d’émerger. Il en est ainsi des actions juridiques menées par des associations à l’encontre des entreprises, actions qui, bien que n’étant pas nouvelles, semblent se multiplier.