Début septembre 2022, une lettre adressée au conseil municipal de la ville néerlandaise de Haarlem (environ 163 000 habitants) par Robbert Berkhout, l’un de ses adjoints au maire, a eu l’effet d’une bombe. Dans ce courrier, l’échevin indique qu’il a informé trois des cinq prestataires en charge de la communication extérieure gérée par la municipalité que les publicités pour la « viande industrielle » ne seraient plus autorisées. En fait, cette lettre n’est que la mise en œuvre d’une motion déposée le 11 novembre dernier par la conseillère municipale Ziggy Klazes, membre du parti écologiste (GroenLinks). Cette motion avait été adoptée par le conseil municipal, mais elle avait été moins ébruitée.
De plus en plus d’études montrent que l’élevage industriel est un facteur majeur du changement climatique. Pour Ziggy Klazes, on ne peut donc pas dire aux gens qu’il y a une crise climatique et, en même temps, les inciter à acheter des produits qui en sont l’une des causes. Mais devant la levée de boucliers, dès le 4 septembre, elle a tenu à faire une mise au point dans les médias. En premier lieu, il ne s’agit pas d’interdire la publicité pour toutes les viandes ; seules celles issues de l’élevage industriel sont concernées. Par ailleurs, cette interdiction ne touchera que les espaces publicitaires loués par la municipalité. Elle ne visera pas les entrepreneurs de la ville comme les bouchers ou les friteries. Quoi qu’il en soit, cette restriction ne pourra pas entrer en vigueur avant 2024, le temps que les contrats avec les exploitants d’abribus arrivent à leur terme. Si cette décision ne rencontre pas d’obstacle juridique, Haarlem sera la première ville au monde à appliquer une telle politique.
Même si elle peut paraître symbolique, cette initiative rejoint le mouvement qui a abouti à la restriction de la publicité pour les énergies fossiles dans certaines régions du monde et les actions qui tendent à limiter la consommation de viande. Ses opposants ne s’y trompent pas : cela pourrait faire boule de neige.
Parallèlement, le 30 août 2022, l’organisation internationale Mighty Earth a lancé une campagne d’opinion à l’encontre de Carrefour. L’ONG accuse la chaîne de distribution de participer à la déforestation en Amazonie. Cette campagne s’appuie sur un rapport publié en amont et envoyé au préalable au groupe. Dedans, l’ONG affirme que, selon une enquête qu’elle a menée, deux tiers des produits carnés des magasins Carrefour au Brésil sont fournis par JBS, leader mondial de la transformation de viande et acteur majeur de la déforestation dans le pays.
Certains de ces produits proviennent d’élevages illégaux sur le territoire autochtone Uru-Eu-Wau-Wau, dans l’État de Rondônia. En réponse à la campagne, l’enseigne a décidé de suspendre ses relations avec deux abattoirs de JBS dans le Rondônia qui représentent 12 % de ses approvisionnements auprès de la firme. Un premier pas pour l’association, qui demande cependant à Carrefour d’aller plus loin. Elle lui réclame notamment de mettre un terme à ses relations avec les principales sociétés impliquées dans la déforestation et la destruction d’écosystèmes naturels (JBS, Bunge et Cargill), et de ne plus participer à la déforestation dès maintenant, et non pas en 2035.