D’après une étude publiée en avril 2021 par le WWF, l’Europe est le deuxième plus important « importateur de déforestation » mondial, juste derrière la Chine. En 2017, l’Union était responsable de 16 % de la déforestation associée au commerce international, ce qui représentait deux cent trois mille hectares. C’est dans ce cadre que la Commission européenne a présenté le 17 novembre 2021 sa proposition législative qui tend à introduire un « devoir de diligence raisonnable » obligatoire pour les produits vendus sur le marché de l’Union afin de s’assurer qu’ils ne sont pas liés à la déforestation ou à la dégradation des forêts.
La législation visera en particulier le bœuf, le soja, l’huile de palme, le bois, le cacao, le café et les produits dérivés mis sur le marché communautaire. Pour Delara Burkhardt, eurodéputée sociale-démocrate allemande, « les entreprises devront désormais prouver que leurs produits n’ont pas contribué à la destruction des forêts avant d’être autorisés sur le marché européen […]. Ce sont les entreprises, et non les consommateurs ou les organismes de certification, qui sont chargées de garantir que les chaînes d’approvisionnement internationales sont équitables et durables. »
Les entreprises, y compris les petites et moyennes, devront collecter des informations sur les produits qu’elles ont mis sur le marché européen depuis janvier 2021 pour attester qu’ils ne sont pas liés à la déforestation. La démarche de diligence raisonnable devra instaurer des « mesures d’atténuation adéquates et proportionnées », parmi lesquelles des outils de surveillance par satellite, des audits sur le terrain, le renforcement des capacités des fournisseurs… pour confirmer l’origine des produits. Les pays de l’Union pourront suspendre la vente des produits s’ils présentent des risques de déforestation non négligeables. Des sanctions pourront également être prononcées à l’égard des opérateurs et des commerçants qui enfreindront les règles (amendes, confiscation des produits, etc.).
Les organisations environnementales et certaines formations politiques saluent cette initiative, mais regrettent qu’elle ait écarté plusieurs aspects essentiels. Certains écosystèmes ne sont, en effet, pas pris en compte alors qu’ils constituent d’importants puits de carbone, comme le Cerrado en Amérique du Sud et les tourbières d’Asie du Sud-Est. Le caoutchouc a également été oublié, bien qu’il soit un facteur majeur de déforestation dans certaines zones telles que dans la région du Mékong.
Le commissaire à l’environnement, Virginijus Sinkevičius, s’est justifié en précisant que les produits ont été ciblés en raison de leur fort impact sur la déforestation mondiale et que la portée de la législation pourra être étendue ultérieurement. Une révision de la législation est d’ailleurs prévue au plus tard deux ans après son entrée en vigueur. Mais, pour certaines ONG comme le WWF, cet examen arrivera trop tard pour des zones telles que la savane du Cerrado au Brésil, où 3 774 kilomètres carrés de terres ont déjà été détruits cette année.