Le 25 janvier dernier, le groupe de luxe français Kering a annoncé qu’une équipe d’audit de la Guardia di Finanza (la police douanière et financière italienne) de Milan avait remis un rapport selon lequel sa filiale suisse, Luxury Goods International (LGI), aurait, entre 2011 et 2017, exercé des activités en Italie qui auraient dû donner lieu au paiement d’impôts sur les sociétés dans ce pays. Si ces conclusions sont confirmées, elles peuvent conduire à un redressement fiscal de 1,4 milliard d’euros. Mais Kering conteste les faits. Pour le groupe, les activités de LGI en Suisse sont réelles : la filiale assure la distribution et la vente en gros des articles de Gucci et de plusieurs autres marques appartenant à Kering (Bottega Veneta, Yves Saint Laurent, Balenciaga…). Toutefois, selon l’ONG suisse Public Eye – qui a publié en 2016 un dossier sur la fashion valley dans le Tessin –, l’implantation de la filiale dans ce canton suisse aurait aussi, voire surtout, pour objectif d’optimiser la charge d’impôt du groupe. LGI capte ainsi une partie substantielle des bénéfices du groupe et participe grandement, grâce à un taux d’imposition très avantageux négocié avec les autorités du Tessin et un montage faisant intervenir Kering Luxembourg SA et Kering Holland, à « la rationalisation du taux d’impôt » du groupe. Si Kering conteste le caractère illégal du montage, ce que les autorités italiennes doivent à l’inverse s’efforcer de démontrer, il n’en demeure pas moins que la construction interroge sur la volonté réelle du groupe de contribuer à une juste répartition de la valeur créée. Pour mémoire, sur l’exercice 2017, le « taux d’impôt théorique » de Kering n’a été que de 13,4 %.