L’association La Quadrature du Net n’aura attendu que trois jours après l’entrée en vigueur du Règlement européen sur la protection des données (RGPD) pour intenter une action contre les géants de l’Internet et les scientifiques spécialisés dans la robotique et l’intelligence artificielle sont déjà bien organisés pour s’opposer aux utilisations négatives de ces technologies. Cette accélération des réactions, qui répond à la gravité et au poids des dangers menaçant les libertés et les droits fondamentaux de chacun, bénéficie aussi pleinement des technologies de l’information. C’est tant mieux. Car même si le temps de réaction des organisations de la société civile pour alerter la communauté des risques qui la menacent est bien plus rapide qu’il y a vingt ans, celui de l’opinion, des pouvoirs publics et des entreprises reste trop lent au vu de l’importance des enjeux (bien qu’il ait lui aussi été considérablement réduit).

La prise en compte des paramètres économiques et financiers dans le lancement d’initiatives est tout à fait compréhensible. Mais on a parfois l’impression que tant que les risques ou les nuisances n’ont pas atteint un seuil critique ou généré une forme de marché, les actions concrètes semblent destinées à cacher des symptômes dont la vue est désagréable plutôt qu’à engager une transformation des pratiques et des organisations en profondeur. Il n’est pas normal que les sociétés H&M et GAP fassent encore aujourd’hui l’objet de rappels à l’ordre sur les conditions de travail dans leurs chaînes d’approvisionnement, alors qu’elles étaient parmi les premières, il y a plus de vingt ans, à être interpellées sur ces questions. Il est donc impératif de se saisir à la source des problématiques sociétales avant qu’elles ne se transforment en situations à traiter en urgence.