La guerre commerciale mondiale ouvertement déclenchée par Donald Trump a, bien sûr, d’importantes répercussions négatives sur le commerce international et, notamment, sur l’approvisionnement en terres rares de plusieurs industries. Les tensions se sont aggravées début avril à la suite des mesures administratives prises par la Chine pour contrôler ses exportations de minerais, en réponse aux augmentations des droits de douanes américains. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la Chine domine plus de 60 % de l’extraction minière de ces métaux, et 92 % de leur production raffinée. Cela devrait donc encore accélérer la course mondiale à ces matériaux hautement stratégiques.
La demande en lithium pourrait aussi faire face à des tensions. De plus, son exploitation est contestée par de nombreuses communautés autochtones dans le monde. Une étude publiée le 1er décembre 2022 par la revue Nature Sustainability indiquait, d’ailleurs, que « les produits ayant la plus forte proportion de réserves et de ressources sur ou à proximité des terres des peuples autochtones sont le lithium (85 %) et le manganèse (75 %) ». On observe ce type de différend dans le désert d’Atacama au Chili, deuxième producteur mondial, où les Atacamènes luttent pour protéger leurs terres ancestrales de l’exploitation anarchique du lithium.
La Bolivie espère aussi devenir un producteur de lithium. En 2023 et 2024, le pays a signé deux importants contrats respectivement avec le consortium chinois CATL, BRUNP & CMOC (CBC) et le groupe russe Uranium One, filiale de la compagnie nationale russe de l’énergie atomique, Rosatom. Ces accords visent à établir des installations d’extraction directe de lithium dans le salar (désert de sel) d’Uyuni, dans le sud-ouest du pays. Ce salar abrite l’une des plus grandes réserves de lithium au monde et fait partie du vaste triangle de lithium partagé avec le Chili et l’Argentine.
Le 27 mai 2025, le tribunal mixte civil et commercial, de la famille, de l’enfance et de l’adolescence et d’instruction criminelle de la ville de Colcha K (département de Potosí) a rendu une décision ordonnant la « suspension immédiate » de ces accords. Cette décision faisait suite à un recours collectif déposé par l’Union provinciale des communautés autochtones de Nor Lípez (CUPCONL) qui affirmait que les projets avaient violé leurs droits environnementaux et avaient été autorisés à se poursuivre sans consultation formelle préalable. Mais le 5 juin, le tribunal a rejeté la plainte et l’ordre de suspension des deux contrats qui avait été prononcé lors de la phase d’acceptation du recours. Les contrats doivent encore être approuvés par l’assemblée législative pour entrer pleinement en vigueur.
C’est dans ce contexte conflictuel et chaotique que la Colombie se mobilise pour obtenir des soutiens en faveur d’un accord juridiquement contraignant sur les minéraux. Elle prévoit ainsi de présenter une résolution invitant les pays à entamer des négociations sur un traité lors de l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (ANUE) en décembre prochain. Le processus s’inspirerait des négociations mondiales pour un traité sur le plastique. Pour Mauricio Cabrera Leal, vice-ministre colombien de la Politique environnementale, un accord contraignant est indispensable pour évaluer avec transparence l’ensemble de la chaîne de valeur au niveau international.
De leur côté, les organisations militantes font également pression pour que la présidence brésilienne de la COP30 inscrive des mesures visant à lutter contre les risques environnementaux et sociaux liés aux minéraux de transition à l’ordre du jour du sommet de l’ONU sur le climat, qui se tiendra à Belém en novembre prochain.