Le Strategic Organizing Center (SOC) est une coalition de syndicats étatsuniens qui représente plus de 4 millions de membres. Ces syndicats entrent dans le cadre de la loi Taft-Hartley sur les « fonds de pension syndicaux » et revendiquent avoir une influence sur plus de 250 milliards de dollars d’actifs sous gestion. Le SOC est doté d’un organe appelé SOC Investment Group. Cette instance travaille avec des fonds de retraite dans lesquels sont impliqués des syndicats affiliés au SOC. Elle soutient les initiatives réglementaires et actionnariales qui ont pour but de garantir des administrateurs indépendants et responsables au sein des sociétés, des pratiques raisonnables quant à la rémunération des dirigeants, et des politiques saines sur les plans environnemental, social et des affaires.
Le 18 octobre 2022, SOC IG a adressé une lettre à Séoul au directeur général de Hyundai, Euisun Chung. Dans cette lettre, l’instance indique que les investisseurs qu’elle représente sont préoccupés par une enquête dévoilée en juillet dernier par l’agence Reuters. Celle-ci révélait que SMART Alabama LLC, une filiale du groupe coréen située à Luverne (Alabama), employait une cinquantaine d’enfants dont le plus jeune était âgé de 12 ans, et ce, en violation de la loi fédérale. Le courrier cite aussi une enquête menée en août 2022 par le ministère du Travail qui a relevé la présence d’enfants chez SL Alabama, un sous-traitant de l’entreprise également installé en Alabama. Le porte-parole de Hyundai a déclaré qu’à la suite du contrôle du ministère du Travail, le fournisseur incriminé avait changé de direction et renforcé l’audit de ses pratiques de travail.
À l’occasion de cette affaire, le directeur général de SOC IG, Dieter Waizenegger, a souligné que, dans le système américain, les violations du droit du travail avaient généralement des conséquences financières assez faibles. Par exemple, l’amende infligée à SL Alabama s’est élevée à 30 076 dollars. À l’inverse, les violations des droits sociaux fondamentaux peuvent avoir un impact sur la réputation et les affaires. Il encourage donc le conseil d’administration de la société à prendre des mesures telles qu’une évaluation indépendante des risques de violation des droits sociaux dans sa chaîne d’approvisionnement, et d’en rendre les résultats publics.
Aux États-Unis, l’engagement actionnarial a, depuis plusieurs années, intégré l’action syndicale. Des centrales (Unite, SEIU) ont même lancé ponctuellement des actions en France (Sodexo, PPR/Kering, Imerys, Renault-Nissan…). La place des organisations syndicales dans la gestion des fonds de pension reste cependant encore très marginale. En s’appuyant sur les travaux de l’universitaire américaine Teresa Ghilarducci, Catherine Sauviat et Jean-Marie Pernot estimaient en 2000 que les syndicats exerçaient « une influence indirecte sur la moitié environ des actifs gérés par les fonds de pension ». Mais cette représentation syndicale n’en constituait pas pour autant un pouvoir de contrôle. Pour optimiser leur influence sur les pratiques sociales et environnementales des entreprises, les syndicats doivent donc combiner les types d’actions et élargir le cercle des investisseurs engagés.