Facebook et Instagram autorisent les discours de haine contre les Russes. Une décision contestée par des ONG

Certains produits et services peuvent être à double tranchant (positif ou négatif) en fonction de l’usage qui en est fait. C’est, notamment, le cas des réseaux sociaux. Ils sont un formidable outil d’expression et d’échange. Mais les dérapages sont également nombreux. La question se pose donc du sérieux et de la probité des garde-fous instaurés par les prestataires. Ainsi, Facebook a été récemment attaqué pour avoir laissé prospérer des discours de haine à l’encontre de minorités au Myanmar (Birmanie), en Éthiopie (région du Tigré) ou en Inde…

Les principes de l’entreprise, et surtout leur mise en œuvre, sont loin d’être parfaits. Mais ils ont le mérite d’exister et constituent un cadre sur lequel les défenseurs des libertés peuvent s’appuyer pour réclamer des comptes. Cependant, certains observateurs font remarquer que ces principes sont à géométrie variable et mettent en avant deux poids, deux mesures. Le 10 mars 2022, l’agence Reuters a révélé que Meta Platforms, le groupe propriétaire de Facebook et d’Instagram, avait décidé d’admettre temporairement les discours de haine contre les Russes. Cette autorisation permet les appels à la violence, voire au meurtre des soldats ou de personnalités politiques russes. Les appels à la violence contre les civils russes restent cependant interdits. Ces règles ne s’appliqueraient qu’aux internautes utilisant Facebook et Instagram depuis l’Ukraine, la Russie, la Pologne, la Lettonie, la Lituanie, l’Estonie, la Slovaquie, la Hongrie et la Roumanie.

L’organisation étatsunienne Access Now, qui s’est fixé pour mission de défendre les droits civils numériques des personnes à travers le monde, fait remarquer que, dans d’autres régions du globe, le groupe avait suivi une autre logique. Ainsi, en 2021, des centaines de publications de Palestiniens protestant contre les expulsions de Jérusalem-Est avaient été supprimées par Instagram. La plate-forme avait, par la suite, évoqué des erreurs techniques. Marwa Fatafta, en charge de l’action d’Access Now sur les droits numériques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, s’interroge : « Les plates-formes technologiques ont la responsabilité de protéger la sécurité de leurs utilisateurs, de défendre la liberté d’expression et de respecter les droits humains. Mais cela soulève la question suivante : la sécurité et la parole de qui ? » En d’autres termes, est-il du ressort d’une entreprise privée de décider, selon les cas, de ce qui est bon et de ce qui ne l’est pas, et d’autoriser unilatéralement la promotion de la haine ou les appels à la violence ?