Il y a plus d’un an, le New York Times publiait des documents confirmant la répression dont la population ouïgoure fait l’objet dans la province du Xinjiang en Chine (IE n° 312). Cette information a suscité de nombreuses protestations dans le monde de la part des associations et des syndicats. Mais aussi de la part d’autres acteurs. Ainsi, le 6 janvier dernier, la société Marks & Spencer est devenue l’une des premières entreprises à rejoindre une initiative lancée par la société civile, en octobre 2020, et visant à mettre fin au travail forcé dans l’approvisionnement en coton et en vêtements du Xinjiang. Auparavant, le 10 décembre 2020, le footballeur français Antoine Griezmann avait annoncé qu’il mettait un terme à son contrat avec la société chinoise Huawei soupçonnée de mener des tests permettant la reconnaissance faciale des Ouïgours. Dans un article du 12 janvier, le cabinet de recherche IPVM, spécialisé dans l’industrie de surveillance, a montré que Huawei a bien déposé, en juillet 2018, une demande de brevet de reconnaissance faciale intégrant la possibilité d’identifier les Ouïgours. À la suite de cet article, l’entreprise a répondu que l’identification des Ouïgours n’aurait jamais dû faire partie de la demande de brevet et qu’elle prenait des mesures « proactives » pour modifier la demande. IPVM s’interroge cependant sur l’interprétation du terme proactif par Huawei. L’article cite d’autres sociétés chinoises ayant déposé un brevet qui intègre spécifiquement l’ethnie ouïgoure parmi les caractéristiques d’identification des personnes (Megvii, SenseTime) ou faisant référence aux origines ethniques, sans préciser lesquelles (Alibaba).
En novembre 2015, la loi britannique contre l’esclavage moderne (Modern Slavery Act) est entrée en vigueur (IE n° 225). Elle oblige les quelque 18 625 sociétés installées dans le pays et réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 36 millions de livres (40 millions d’euros) à publier un rapport dans lequel elles indiquent les démarches qu’elles ont engagées pour s’assurer que leurs activités ou celles de leur chaîne d’approvisionnement n’ont aucun lien avec l’esclavage et le trafic d’êtres humains. Le 12 janvier, le ministre des Affaires étrangères, Dominic Raab, a déclaré à la Chambre des communes que le gouvernement allait répondre aux allégations de travail forcé dans la province Xinjiang, notamment en renforçant la loi sur l’esclavage moderne (rédaction de conseils et de lignes directrices en matière d’approvisionnement, alourdissement des amendes pour les entreprises qui ne respectent pas cette loi…). Mais pour les associations de protection des droits humains, ces propositions sont insuffisantes. La loi sur l’esclavage moderne n’est qu’une obligation de déclaration. Elles appellent donc à des réglementations qui obligent les entreprises à prendre des mesures préventives pour lutter contre l’esclavage moderne, qui les tiennent pour responsables de tout abus dans leurs chaînes d’approvisionnement et qui permettent aux victimes de demander réparation (à l’instar de la loi française sur le devoir de vigilance).