En mai 2020 (IE n° 322), nous relayions l’inquiétude des organisations internationales quant à la sécurité sanitaire des ouvriers des usines malaisiennes qui confectionnent les gants en latex qui concourent à notre propre sécurité sanitaire. La Malaisie fournit plus de 60 % de la production mondiale de gants en caoutchouc et Top Glove, le principal fabricant du pays, un quart des gants en latex médicaux dans le monde. Le bénéfice net du géant malaisien pour l’exercice clos en août 2020 s’est établi à 470 millions de dollars contre 90 millions de dollars pour l’année précédente, et son cours de Bourse a progressé de 250 % entre avril et juillet. Mais l’entreprise a aussi fait l’objet de nombreuses critiques pour le traitement qu’elle a réservé aux travailleurs migrants. Des enquêtes menées en avril ont indiqué que les ouvriers devaient travailler parfois jusqu’à 12 heures par jour pour répondre à la demande, qu’ils ne bénéficiaient d’aucune protection adéquate et que la distance sociale dans les usines n’était pas observée. Par ailleurs, les travailleurs migrants dormaient dans des dortoirs de 24 personnes et prenaient des bus bondés pour se rendre au travail. Parallèlement, en juillet, les États-Unis ont interdit l’importation en provenance de deux filiales de Top Glove après des allégations de travail forcé.
À partir de novembre, l’entreprise a dû arrêter temporairement la production d’une partie de ses usines pour participer à des dépistages massifs dans ses zones d’implantation à la suite desquels plus de 5 000 ouvriers ont été testés positifs, ce qui a fait de l’entreprise l’un des plus grands clusters du pays. En deux mois, l’action de la société s’est dépréciée de 30 %. Pourtant, la situation avait été dénoncée auparavant par certains salariés, mais à leurs risques et périls. Ainsi, en septembre, Yubaraj Khadka, un travailleur népalais de 27 ans, a été licencié après s’être inquiété du manque de distanciation sociale dans les usines. Face aux réactions, l’entreprise a fini par prendre des mesures pour améliorer les conditions de travail des ouvriers. Elle n’a toutefois pas encore précisé lesquelles. Le 23 décembre, elle a également enfin déclaré que les lanceurs d’alerte ne seraient plus exposés à un licenciement et qu’elle avait mis en service trois lignes d’assistance téléphonique pour recueillir les plaintes des salariés.