Plus de 200 employés d’Alphabet, la société mère de Google, ont annoncé, le 4 janvier 2021, la formation du premier syndicat au sein du groupe après plus d’un an de préparation en secret. Tous les employés d’Alphabet installés aux États-Unis et au Canada pourront adhérer à ce syndicat dénommé Alphabet Workers Union (AWU), ainsi que les sous-traitants et le personnel temporaire. En septembre 2019, des employés d’un sous-traitant de Google avaient ouvert la voie en annonçant qu’ils rejoignaient le syndicat United Steelworkers (IE n° 308). AWU indique qu’il n’est pas organisé autour d’une liste de revendications ou de problèmes spécifiques mais vise plutôt à promouvoir des conditions de travail inclusives et à garantir qu’Alphabet agisse de manière éthique dans l’intérêt de la société et de l’environnement. Le syndicat demande également plus de transparence de la part d’Alphabet sur la destination du travail des employés et a déclaré que les collaborateurs devraient être autorisés à refuser de travailler sur des projets qui ne correspondent pas à leurs valeurs individuelles. Cette revendication fait, notamment, référence au programme militaire Maven qui a fait débat parmi les salariés du groupe en 2018 (voir IE). Aux États-Unis, les syndicats sont généralement formés après une élection conduite par le National Labor Relations Board (NLRB). AWU a été constitué sans cette ratification fédérale, ce qui signifie qu’il ne pourra pas participer à des négociations collectives. Il est affilié à la section locale 1 400 de Communications Workers of America (CWA), le plus important syndicat américain des communications et des médias.
Sur son site internet, AWU décrit l’insatisfaction croissante du personnel de Google. La moitié des quelque 120 000 personnes qui travaillent pour Google sont embauchées en tant qu’intérimaires ou travaillent chez des fournisseurs ou des sous-traitants, ce qui signifie qu’elles n’ont pas accès aux avantages offerts aux salariés du groupe. Par ailleurs, l’entreprise a octroyé des « parachutes dorés » à des dirigeants impliqués dans des affaires de harcèlement sexuel. Plus récemment, le groupe a été critiqué pour le licenciement de Timnit Gebru, la co-responsable de l’équipe de la société sur l’éthique de l’intelligence artificielle (IE n° 335), qui avait remis en cause l’objectivité des technologies d’analyse faciale. Et le 2 décembre dernier, le NLRB a déposé une plainte à l’encontre de l’entreprise. L’agence a estimé que la société avait violé les lois du travail américaines en espionnant les salariés qui organisaient des manifestations (IE n° 334). Si les moyens dont dispose AWU sont encore très limités, cette initiative n’en constitue pas moins un tournant historique dans l’histoire du dialogue social au sein du groupe.