En avril 2015, la Chancellerie fédérale suisse avait validé le dépôt d’une initiative populaire fédérale baptisée « Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement » (voir IE). Le but de cette initiative était d’étendre le champ de responsabilité des entreprises en matière de respect des droits humains et environnementaux à leurs filiales situées à l’étranger, ainsi qu’à leurs « relations d’affaires ». L’initiative prévoyait que les entreprises fassent preuve d’une diligence raisonnable et qu’elles soient tenues pour responsables des dommages causés par les sociétés qu’elles contrôlent en cas de manquement à ce devoir de diligence. Force est de constater que cette initiative a suscité d’intenses débats au sein des deux chambres constituant le Parlement suisse (le Conseil national et le Conseil des Etats). Ces débats ont mis en évidence de profonds désaccords internes, mais aussi des divergences entre les deux chambres parlementaires.
Tout cela a contribué à de nombreux reports (IE n° 308) et à l’élaboration de deux contre-projets. Les tenants de l’initiative étaient prêts à retirer leur texte si le contre-projet du Conseil national – bien que moins exigeant que l’initiative elle-même – était adopté. Mais c’est celui du Conseil des Etats qui a finalement été choisi par la conférence de conciliation le 4 juin 2020. Ce projet ne prévoit une obligation de diligence que pour les « minerais de conflit » (étain, tantale, tungstène, or) ou lorsque le recours au travail des enfants est fondé. Dans les autres cas, il suffira d’établir un simple rapport ou, le cas échéant, de mentionner les raisons pour lesquelles l’entreprise renonce à effectuer une gestion des risques. Rien n’est prévu si un dommage est observé. Les porteurs de l’initiative et les organisations qui la soutiennent qualifient le texte adopté de « contre-projet alibi ». Les Suisses devront donc choisir, probablement en novembre, entre l’initiative déposée en 2015 et le contre-projet adopté par les deux chambres.