La conduite d’opérations commerciales dans des zones sensibles ou avec des parties controversées peut non seulement aboutir, pour une entreprise, à une détérioration de son image et de sa réputation, mais aussi à des actions juridiques à son encontre. Si ces situations sont rares, elles existent néanmoins. On se souvient, dans ce registre, des accusations portées contre le cimentier LafargeHolcim – soupçonné d’avoir financé les services de l’organisation terroriste Daesh afin d’assurer la « protection » de ses installations de Jalabiya (Syrie) (IE n° 254) – ou contre BNP Paribas, à qui l’on reprochait d’avoir facilité le financement d’une importante cargaison d’armes destinées aux Forces armées rwandaises (FAR) qui ont participé au génocide des populations tutsies (IE n° 262).
Les activités menées au Soudan sont également accusées d’avoir favorisé de graves violations du droit international (voir IE), notamment entre 1983 et 2005, alors que ce pays était le théâtre d’une guerre civile terriblement meurtrière entre le Nord et le Sud. Le 23 octobre dernier, le gouvernement suédois a donné son accord à la justice du pays pour poursuivre le directeur général de la compagnie pétrolière Lundin Oil (Alex Schneiter) et son président, Ian Lundin, pour complicité de crimes de guerre au Soudan entre 1997 et 2003. La compagnie est soupçonnée d’avoir financé l’armée soudanaise, ainsi que des milices elles-mêmes accusées d’avoir commis des exactions à l’égard des populations civiles, afin de sécuriser les champs pétroliers situés dans le block 5A attribué en 1997 à Lundin Oil (désormais connue sous le nom de Lundin Petroleum) et de construire une route entre le camp de base du groupe et ses puits. Une procédure préliminaire concernant ces faits est ouverte depuis 2010, mais les faits s’étant déroulés à l’étranger et Alex Schneiter étant de nationalité suisse, un accord du gouvernement suédois était nécessaire pour lancer les poursuites.