Plusieurs dizaines de milliers de fermiers et de pêcheurs des communautés Ogale et Bille de la région du delta du Niger (Nigeria) ont décidé, avec l’aide de l’avocat Leigh Day, de poursuivre en justice la compagnie anglo-néerlandaise Shell pour des faits de pollution résultant de l’exploitation de champs pétroliers. En janvier 2015, 15 600 fermiers et pêcheurs de la communauté Bodo avaient déjà conclu un accord avec Shell pour mettre fin à une procédure engagée devant la justice londonienne et obtenu 55 millions de livres de dédommagement pour des faits de même nature (voir Impact Entreprises n° 207). Le géant pétrolier se défend à nouveau en indiquant que les pollutions incriminées résultent de sabotages et qu’il n’exploite plus de gisements dans la région depuis plus de vingt ans. C’est justement là que le bât blesse. D’une part, parce que la situation s’est en effet perpétuée durant des décennies occasionnant une des pollutions les plus considérables de l’histoire de l’industrie pétrolière qui s’étend, selon une estimation de l’association Amnesty International, sur une superficie de la taille du Portugal et, d’autre part, parce que les 5 000 kilomètres d’oléoducs font l’objet d’une surveillance et d’un entretien très insuffisants, ce qui est contraire non seulement aux règles élémentaires de la responsabilité élargie des entreprises, mais aussi au droit nigérian. Le passif est donc gigantesque et les actions à l’encontre de la compagnie anglo-néerlandaise pourraient se multiplier auprès de différentes juridictions, et ce d’autant plus que la Cour d’appel de La Haye a estimé, le 18 décembre dernier, qu’elle était compétente pour juger des faits de pollution occasionnés par une filiale de Shell au Nigeria (voir Impact Entreprises n° 227).