L’AIE critiquée pour le manque d’ambition de son approche de la question climatique

Le 2 avril, plusieurs personnalités du monde universitaire, des membres d’institutions internationales, d’ONG ou issus de la communauté financière ont écrit une lettre au directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), Fatih Birol, pour exprimer leur déception à l’égard de la dernière version de son World Energy Outlook (WEO). Selon les signataires de la lettre, compte tenu de l’influence que le WEO est susceptible d’avoir sur les politiques gouvernementales et le comportement des acteurs dans la lutte contre le dérèglement climatique, les scénarios pris en compte par le rapport ne sont pas assez ambitieux. Les dernières analyses montrent en effet que les émissions de gaz à effet de serre doivent être diminuées de moitié d’ici à peine plus d’une décennie « pour réduire le risque d’un basculement irréversible qui endommagerait définitivement notre climat, notre économie et l’humanité ».

La lettre demande donc à Fatih Birol que le scénario central du WEO (intitulé New Policies Scenario, NPS) soit clairement identifié dans le document comme un scénario basé sur les tendances observées, qui placent le monde sur une trajectoire très dangereuse qui se traduirait par une élévation de la température comprise entre 2,7 °C et 3 °C. En donnant un rôle central à ce scénario, le WEO prend le risque qu’il soit interprété comme un guide à suivre. Les signataires réclament également que l’AIE développe un scénario de développement durable (Sustainable Development Scenario, SDS) actualisé reflétant toute l’ambition de l’accord de Paris et qu’elle en fasse la référence centrale du WEO. Ce scénario devrait, au minimum, intégrer une probabilité raisonnable de limitation de l’augmentation de la température à 1,5 °C, alors que le SDS actuel ne vise qu’une probabilité de 50 % de contenir l’augmentation de la température au-dessous de 2 °C. Or, on sait aujourd’hui qu’il existe une différence notable, en termes de conséquences, entre une limitation de l’élévation de la température à 1,5 °C et une limitation de son augmentation à 2 °C.