Le 23 mars 2023, le Premier ministre norvégien a déclaré dans le journal norvégien Bergens Tidende que l’exploitation minière en haute mer pouvait se faire sans nuire à la diversité biologique de l’océan. Cette annonce a suscité de nombreuses réactions de la part tant des opposants à l’exploitation des grands fonds marins que des partisans de cette démarche industrielle. Hans Olav Hide, président de la société norvégienne Loke Marine Minerals, a ainsi précisé que cette pratique pourrait aider l’Europe à être compétitive face à la domination chinoise sur les chaînes d’approvisionnement en métaux pour batteries. L’argument d’indépendance est souvent avancé par les acteurs de ce secteur d’activité, et notamment par le Canadien The Metals Company.
Cette déclaration est intervenue pendant que se déroulaient des discussions au sein du conseil de l’Autorité internationale des fonds marins en Jamaïque (du 13 au 31 mars). Elle survient également alors que le gouvernement norvégien envisage d’exploiter 329 000 km2 de son plateau continental (une superficie de la taille de l’Italie). Une consultation sur le sujet a été clôturée le 27 janvier 2023. Le ministère norvégien du Pétrole et de l’Énergie a tenté de rassurer en précisant que l’évaluation d’impact, les résultats de la consultation et le rapport sur les ressources de la direction norvégienne du pétrole seront largement pris en compte dans la décision sur l’opportunité d’ouvrir ou non la zone à l’exploitation minière en haute mer. Le gouvernement soumettra aussi au Parlement un livre blanc sur la question. Le ministère a ajouté qu’une telle décision n’entraînerait pas nécessairement des activités commerciales.
Pour Kaja Lønne Fjærtoft, biologiste marine et responsable de la section Océans durables au WWF, il se pourrait toutefois que les activités commerciales commencent rapidement si le gouvernement norvégien approuvait l’ouverture de la zone minière, et ce, malgré les promesses de prudence de ce dernier. De son côté, l’Institute of Marine Research situé à Bergen indique manquer d’informations sur 99 % de la zone. De manière générale, les scientifiques conviennent de la vulnérabilité des habitats sensibles en eau profonde. Par ailleurs, les activités minières pourraient avoir un impact sur les pêcheries se trouvant dans les eaux situées au-dessus du plateau continental étendu. Or, la Norvège ne dispose pas de droits exclusifs sur la pêche dans ces zones. L’exploitation minière pourrait donc avoir un impact sur la pêche internationale.
Quelques pays, dont la Chine, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les îles Cook et la Nouvelle-Zélande, ont dans l’idée de lancer des projets similaires. Pour l’instant, aucun n’a commencé l’exploitation à grande échelle. Si le gouvernement norvégien ouvrait la zone envisagée à l’exploitation minière, le pays pourrait devenir l’une des premières nations à démarrer cette activité dans ses eaux et, du même coup, initier une fuite en avant à l’échelle mondiale. C’est pourquoi de nombreuses personnalités et ONG exhortent la Norvège à soutenir un moratoire mondial sur l’exploitation minière en haute mer.