Le problème de l’accès à la terre n’est pas nouveau. Mais il s’accentue sous les effets de la pression démographique, des conflits d’usage (agro-industrie, exploitations minières, grands barrages, installation de zones résidentielles ou touristiques, centrales électriques, etc.) et de la concentration des terres entre les mains d’un nombre réduit d’acteurs. De fait, les réformes foncières vont bon train, en particulier dans les pays émergents ou en développement. Mais elles ne s’orientent pas nécessairement dans le sens de l’intérêt des populations. En Thaïlande – pays dirigé par une junte militaire depuis le coup d’Etat de 2014 – par exemple, le nombre de personnes déplacées et dépossédées des terres qu’elles exploitaient depuis des générations a fortement augmenté, venant ainsi accroître la population urbaine et les problèmes sociaux et environnementaux liés à cet exode. Pour libérer des terres, le gouvernement exige que les personnes qui les occupent présentent un titre foncier (ce qu’elles sont le plus souvent incapables de fournir) et ce sans concertation.
L’accélération du plan de développement des zones économiques spéciales et un projet résidentiel de luxe sur les contreforts de la montagne sacrée Doi Suthep, dans la grande région touristique de Chiang Mai, a déclenché depuis quelques semaines des manifestations de rue à Bangkok et à Chiang Mai en dépit de l’interdiction des rassemblements instaurée par la junte depuis son accession au pouvoir. Face à ce mouvement grandissant, le Premier ministre Prayut Chan-o-cha a déclaré, le 4 mai, qu’il avait l’intention d’annuler le projet de Chiang Mai et de restaurer le couvert forestier. La décision a été saluée comme une victoire par les manifestants, qui espèrent que cet exemple sera suivi dans d’autres parties du pays afin que les projets publics soient non seulement légaux, mais qu’ils prennent aussi en compte l’opinion des populations locales.