Avant et immédiatement après son élection, Donald Trump a promis de débarrasser le pays des programmes DEI (diversity, equity and inclusion) dans les sphères publique et privée. Une note d’information publiée deux jours après son entrée en fonction disposait que l’administration inciterait le secteur privé à mettre fin aux discriminations et pratiques illégales en matière de DEI. Pour les partisans du locataire de la Maison-Blanche, ces pratiques d’embauche sont discriminatoires, au lieu de privilégier le recrutement au mérite. C’est dans ce cadre que, le 17 mars 2025, Andrea Lucas, présidente de l’Equal Employment Opportunity Commission (EEOC), a adressé une lettre à 20 grands cabinets d’avocats. Elle y exprime ses inquiétudes quant à leurs pratiques d’emploi et de recrutement, notamment celles liées à la diversité, à l’équité et à l’inclusion (DEI).
Dans cette lettre, elle souligne que les cabinets d’avocats ont vanté leurs pratiques d’embauche, y compris en accordant des bourses réservées aux « étudiants de couleur ». Elle ajoute que ces cabinets ont décrit ces pratiques comme « contribuant à créer et à favoriser l’un des pipelines de talents les plus solides et les plus diversifiés de la profession juridique ». Mais Andrea Lucas soutient que ces pratiques pourraient, au contraire, « entraîner un traitement disparate illégal » et, de fait, enfreindre le Titre VII de la loi de 1964 sur les droits civiques qui interdit toute discrimination à l’encontre d’un demandeur d’emploi ou d’un employé en raison de sa race, de sa couleur de peau, de sa religion, de son origine nationale ou de son sexe.
Les missives adressées aux cabinets réclament des informations détaillées sur les stages et les bourses d’études proposés aux étudiants en droit ainsi que sur les pratiques de recrutement et de rémunération des cabinets. Elles demandent aussi de communiquer des informations nominatives sur tous les étudiants en droit et les avocats ayant postulé à des postes au cours des 6 dernières années (nom, sexe, « race », numéro de téléphone, adresse mail, nom de la faculté de droit, moyenne générale…) et une description détaillée des processus de candidature et des critères de sélection appliqués. La date limite de réponse a été fixée au 15 avril. L’EEOC a également indiqué avoir mis en place une adresse électronique permettant aux lanceurs d’alerte de signaler des pratiques DEI potentiellement illégales au sein des cabinets d’avocats.
Les avocats et les experts juridiques expriment leurs inquiétudes quant aux exigences formulées par l’EEOC qui, selon eux, sont intrusives et dépassent son autorité. Toute action officielle de l’EEOC requiert en effet de réunir un quorum parmi les cinq membres de la commission et ne peut être engagée à la demande d’un seul commissaire. De plus, en l’absence d’accusation spécifique, les employeurs ne sont pas tenus de répondre aux demandes. Par ailleurs, les avocats des cabinets interpellés soutiennent que les programmes et initiatives DEI ne sont pas illégaux et sont conformes aux intentions de la loi sur les droits civils. Ces dernières années, de nombreux cabinets avaient observé des disparités en leur sein et décidé d’optimiser leurs recrutements en élargissant leurs horizons et en continuant de recruter les personnes les plus qualifiées tout en étant plus inclusifs.