Plusieurs initiatives semblent vouloir assainir les solutions prétendant conduire à la neutralité carbone

Depuis quelques mois, les organisations écologistes, et notamment l’association Transport & Environment, alertent sur l’existence de biocarburants douteux à base d’huiles de friture provenant de Chine. Au cours des deux dernières années, le marché européen des biocarburants a été inondé par des importations d’huiles usagées chinoises, provoquant un effondrement des prix. Les associations soupçonnent qu’une grande partie de ces combustibles serait en vérité de l’huile de palme contribuant à la déforestation illégalement référencée. Le 19 juillet 2024, la Commission européenne a déclaré qu’elle imposerait des droits antidumping sur les importations de biodiesel en provenance de Chine qui pourront atteindre 36,4 %.

En avril de cette année, toujours dans le domaine des solutions visant à réduire les émissions de GES, la Science Based Targets Initiative (SBTi) – la référence pour définir et certifier les objectifs de décarbonation des entreprises – a annoncé que les crédits carbone seraient valables pour mesurer les émissions du scope 3 des sociétés. Après une levée de boucliers, y compris de la part des salariés de l’organisme, la SBTi a affirmé regretter que sa déclaration ait été sujette à une mauvaise interprétation. Cette controverse a été suivie par la démission de son P.-D.G., Luiz Amaral, le 2 juillet.

Finalement, le 30 juillet, la SBTi est revenue sur ses paroles en disant qu’il existait des preuves suggérant « que divers types de crédits carbone [étaient] inefficaces pour produire les résultats d’atténuation escomptés ». Elle a ajouté qu’une enquête plus approfondie était nécessaire pour prendre une décision ferme sur la question de savoir si les crédits carbone pouvaient être utilisés par les entreprises pour réduire leurs émissions du scope 3. Son projet de norme Corporate Net-Zero, qui intégrera des précisions supplémentaires sur l’utilisation des certificats énergétiques environnementaux et des crédits carbone, sera proposé à la consultation vers la fin de cette année. Une version finale devrait être publiée en 2025. Des entreprises et les professionnels de la compensation carbone ont exprimé leur frustration à la suite de la déclaration de la SBTi.

De son côté, l’ICVCM (Integrity Council for the Voluntary Carbon Market), l’organisme international qui a élaboré une norme mondiale d’intégrité élevée pour le marché volontaire du carbone, a annoncé qu’il exclurait du label CCP (Core Carbon Principles) les crédits carbone émis sur la base des méthodologies d’énergie renouvelable existantes. Ces crédits représentent près d’un tiers du marché volontaire du carbone.

Dans ce contexte, le 30 juillet, Air New Zealand est devenue la première grande compagnie aérienne à abandonner son objectif de réduction des émissions de carbone pour 2030. En 2022, le groupe s’était fixé pour but de diminuer ses rejets de près de 29 % d’ici 2030. L’entreprise a déclaré qu’elle réajustait désormais ce chiffre pour qu’il soit plus réaliste. Elle invoque notamment des difficultés pour renouveler sa flotte et se procurer du carburant durable.

Responsable d’environ 2,5 % des émissions mondiales de GES, l’industrie aéronautique a décidé d’atteindre zéro émission nette d’ici 2050. La plupart des compagnies aériennes prévoient de réduire leurs émissions en combinant compensation et utilisation de nouveaux carburants durables. Les décisions de l’Union européenne, de la SBTi et de l’ICVCM renforcent les doutes sur la possibilité de concilier carburants produits à partir de biomasse et sécurité alimentaire de la population mondiale.