Des associations critiquent l’émission de crédits d’énergie renouvelable résultant de la production d’un barrage hydroélectrique

Malgré les nombreuses attaques dont ils font l’objet, les crédits carbone fondés sur la nature constituent un enjeu essentiel pour certaines entreprises et de potentielles sources de revenus importantes pour quelques États. C’est le cas de la Malaisie. Ainsi, début 2023, la Bourse malaisienne (Bursa Malaysia) a lancé sa Bourse du carbone (Bursa Carbon Exchange – BCX) pour faciliter le commerce des compensations carbone volontaires.

Mais, alors que l’opérateur boursier malaisien met aux enchères des certificats d’énergie renouvelable pour la première fois depuis le lancement de son marché volontaire du carbone, plusieurs organisations environnementales alertent l’opinion sur le caractère trompeur de ce marché. Ces crédits d’énergie renouvelable sont liés à la production du barrage hydroélectrique de Murum, dans l’État du Sarawak. Sa puissance est de 944 MW. La capacité du réservoir est de 12 043 millions de m3. Il est entré en exploitation commerciale en 2014.

L’association d’origine malaisienne RimbaWatch a publié une étude sur le barrage. La construction de l’ouvrage, entre 2008 et 2015, aurait défriché 24 500 hectares de forêt. Cette déforestation a eu un impact sur l’habitat d’espèces protégées comme le semnopithèque à coiffe, le gibbon de Müller et plusieurs autres. Les émissions de GES associées à cette déforestation se sont élevées à près de 9 millions de tonnes d’équivalent CO2. Les grands projets hydroélectriques sont par ailleurs une autre importante source d’émissions de GES en raison de la décomposition de la matière organique dans le réservoir qui entraîne d’importantes émissions de méthane.

La construction du barrage a déplacé et réinstallé plus de 1 400 villageois autochtones Penan et Kenyah sans leur consentement libre, préalable et éclairé. Ces personnes ont perdu tout lien avec leurs terres ancestrales le long des rivières Pleiran et Danum, perturbant de fait leur mode de vie traditionnel. Dans les zones de réinstallation, les populations ont été confrontées à des terres infertiles, des rivières polluées, des forêts affectées par les plantations industrielles, un manque de produits de première nécessité… L’étude d’impact social et environnemental n’a pas été mise à la disposition du public et des communautés, ni avant ni pendant la construction. Cette étude n’était toujours pas terminée quatre ans après le début des travaux. Les négociations de réinstallation n’ont commencé que deux ans après le début de la construction du barrage.