L’association Public Eye a mené des enquêtes au Brésil (État d’Espírito Santo) et au Mexique (région du Soconusco dans le Chiapas) sur les plantations de café auprès desquelles s’approvisionne Nestlé. Ces enquêtes ont donné lieu à une analyse dans un nouveau rapport intitulé Le Plan Nescafé ou la fable du café durable, publié le 18 juin 2024. L’ONG rappelle d’abord que la multinationale suisse réalise un quart de son chiffre d’affaires avec le café. Elle représente aussi 25 % du commerce mondial du café, estimé à près de 100 milliards de dollars en 2022. Son poids est donc considérable pour assurer un niveau de vie convenable aux petits planteurs et récoltants.
En 2010, le groupe a lancé un plan (le Plan Nescafé) pour participer à l’amélioration du niveau de vie des paysans. L’entreprise promet que d’ici 2025, elle ne vendra plus que du café provenant d’un approvisionnement « responsable ». Ce plan s’appuie également sur la certification 4C, qui a pour but de garantir que le café respecte des critères écologiques et sociaux de qualité. Mais l’enquête menée par Public Eye montre que pour les petits agriculteurs, la réalité est très éloignée des promesses.
Sur un plan écologique, les plans de robusta, préconisés par Nestlé pour obtenir les rendements attendus, nécessitent de grandes quantités d’engrais. Le Plan Nescafé prévoit de favoriser le recours aux engrais écologiques, mais cela ne s’observe pas sur le terrain. Au contraire, selon les données fournies pour huit pays par le groupe lui-même, l’utilisation d’engrais écologiques a progressé dans seulement deux d’entre eux et diminué dans six autres. Pire, au Mexique, les exploitations sont passées à une production intensive qui appauvrit la biodiversité.
De plus, le rapport met en évidence le travail pénible et mal rémunéré du personnel employé dans les exploitations, les hébergements insalubres ainsi que les graves accidents dus à un matériel agricole inadapté et/ou dont les systèmes de sécurité ont été neutralisés. D’après les témoignages, les contrôles effectués sur place pour vérifier la conformité des conditions sociales et environnementales seraient beaucoup trop superficiels.
L’enquête réalisée fait aussi ressortir que contrairement aux annonces du Plan Nescafé, celui-ci n’a pas entraîné d’augmentation du revenu des agriculteurs. D’après les comptes rendus du groupe, ce revenu aurait progressé dans neuf pays entre 2018 et 2022. Mais, de son côté, l’ONG estime que dans sept des neuf principaux pays fournissant les denrées à la firme (à l’exception donc du Viêt Nam et du Brésil), le revenu des paysans est insuffisant pour leur permettre de vivre dignement. Au Honduras, par exemple, environ 60 % des familles qui participent au Plan Nescafé n’ont pas obtenu un revenu suffisant pour vivre ; elles seraient plus de 75 % au Mexique et en Colombie, et plus de 95 % en Indonésie et en Côte d’Ivoire. Cette situation est principalement due à la pression exercée sur le prix d’achat du café par Nestlé.