Le greenwashing dans les produits financiers commence à faire réagir. L’AMF reste très discrète quant à l’objectivité des informations extra-financières

Les démarches « approximatives » des sociétés qui commercialisent des produits financiers vantant leurs approches écologique et sociale sont désormais dans le collimateur de nombreuses instances officielles dans le monde. L’Australie semble à la pointe sur cette question. Dernièrement, le 6 juin, un tribunal fédéral de ce pays a statué que le fonds de retraite Active Super trustee LGSS Pty Limited avait enfreint la loi en trompant ses membres sur ses investissements dits ESG. Cela fait suite à une plainte déposée en 2023 par le régulateur australien des entreprises, des marchés et des services financiers, l’Australian Securities & Investments Commission (ASIC). L’ASIC affirme qu’entre 2021 et 2023, Active Super a investi dans des titres qu’il prétendait avoir éliminés ou limités grâce à des filtres ESG.

De son côté, le 14 mai 2024, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) a annoncé la publication de ses lignes directrices pour l’utilisation des termes liés à l’ESG ou au développement durable dans le nom des fonds d’investissement. D’après un rapport publié début juin par la société de recherche en investissement Morningstar, les deux tiers des fonds de l’UE affichant des termes liés à la durabilité ou à des critères ESG pourraient être obligés de vendre des actifs ou de changer de nom pour s’aligner sur les nouvelles règles contre le greenwashing de l’ESMA. Les cessions de titres pourraient atteindre 40 milliards de dollars pour que l’ensemble des fonds puissent conserver leur nom.

Pour enfoncer le clou, le 18 juin 2024, une vingtaine d’organisations ont adressé une lettre ouverte à l’Autorité des marchés financiers (AMF) pour lui demander de sanctionner le greenwashing qui caractérise de nombreux fonds, selon elles. Cependant, le gendarme de la Bourse français n’est pas réputé pour son progressisme et sa grande transparence dans les avis qu’il émet.

Ainsi, le 2 novembre 2022, l’association Greenpeace France avait publié une étude dans laquelle elle affirmait que les rejets de GES du groupe TotalEnergies seraient près de quatre fois plus élevés que ce qu’il déclare. L’ONG avait saisi l’AMF. Pour sa part, la compagnie pétrolière avait engagé une action en justice « en vue de réparer le préjudice qu’entraîne la diffusion de cette information trompeuse par Greenpeace ». Finalement, le 28 mars 2024, la justice a annulé la procédure intentée par la compagnie pétrolière. L’AMF, pour sa part, ne s’est toujours pas manifestée sur ce sujet. À l’épreuve du contexte international et de la réglementation européenne, l’organisation devrait finir par se prononcer sur la communication des fonds. Mais il serait bon qu’elle se positionne aussi quant à certaines informations transmises dans les documents d’enregistrement universel des entreprises.