Dans une note du 5 avril 2024, la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) indique que les trois principaux gaz à effet de serre concentrés dans l’atmosphère ont atteint de nouveaux records en 2023. La concentration de dioxyde de carbone, le plus important et le plus répandu des GES émis par l’activité humaine, est arrivé à une moyenne de 419,3 parties par million (ppm) dans l’atmosphère en 2023 (une augmentation de 2 ppm par rapport à 2022). Le méthane dans l’air, dont la durée de vie dans l’atmosphère est plus courte, mais dont le pouvoir de réchauffement global est plus important, s’élève à 1 922,6 parties par milliard (ppb), soit une augmentation de 10,9 ppb en comparaison à 2022. La densité d’oxyde nitreux est quant à elle de 336,7 parties par milliard, en progression de 1 ppb.
Si le CO2 reste le problème majeur, la part du méthane progresse. La quantité de CO2 est de plus de 50 % supérieure à ce qu’elle était avant l’ère préindustrielle. Le méthane est pour sa part 160 % plus élevé.
Dans ce contexte, les initiatives pour faire pression sur les principaux émetteurs de GES se poursuivent sans relâche. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est prononcée le 9 avril 2024 sur les affaires introduites par les citoyennes et citoyens de trois pays : Portugal, France et Suisse. Les deux premières requêtes ont été jugées irrecevables par la Cour pour des questions d’ordre procédural. Concernant le dernier cas, « la Cour a conclu que la Confédération suisse avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de la Convention [européenne des droits de l’homme] en matière de changement climatique ». En établissant un lien entre carence climatique d’un État et atteinte aux droits humains, le jugement ouvre de nouvelles portes en ce qui concerne la justice climatique, même si les conditions d’accès sont très strictes.
Cette perspective n’a d’ailleurs pas échappé à Claire Coutinho, la secrétaire d’État britannique chargée de la sécurité énergétique et du zéro émission nette, qui a exprimé sa préoccupation au sujet de la décision de la Cour de Strasbourg, car le Royaume-Uni est signataire de la Convention. Pour elle, la lutte contre le changement climatique affecte l’économie, l’énergie et la sécurité nationale d’un pays, et les élus sont les mieux placés pour prendre des décisions à ce sujet.
D’autres cas ont établi un lien entre dérèglement climatique et droits humains, comme la Commission philippine des droits de l’homme en mai 2022. Mais c’est la première fois que ce lien est reconnu par une juridiction internationale. En revanche, d’autres sujets environnementaux ont été traités par des juridictions régionales. Ainsi, récemment, le 22 mars 2024, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a condamné l’État péruvien pour violation du droit à un environnement sain des habitants de La Oroya à la suite de plus d’un siècle de pollution industrielle provenant du complexe métallurgique.
Selon certains juristes, la décision de la CEDH est potentiellement transposable aux entreprises. Dans une publication datée d’avril 2024, la base de données Carbon Majors a d’ailleurs identifié l’origine de 1 421 gigatonnes d’émissions d’équivalent CO2 cumulées entre 1854 et 2022. Les rejets des 122 producteurs industriels étudiés représentent 72 % des émissions mondiales de CO2 liées aux combustibles fossiles et au ciment depuis 1751. Sur cette même période, 19 entités ont contribué à hauteur de 50 % à ces rejets de CO2. TotalEnergies se situe à la 19e place du classement.