En 2023, au moins une vingtaine de grandes marques ont fait l’objet d’actions juridiques et/ou administratives, ou ont été interpellées pour greenwashing dans le monde. Cette tendance, encore récente, semble cependant en hausse. Dressons un florilège des actions les plus emblématiques.
Les compagnies pétrolières tiennent le haut du pavé. En février, aux États-Unis, l’ONG Global Witness a déposé une plainte contre Shell auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC). Elle a estimé que la major pétrolière avait exagéré à tort ses investissements dans les énergies propres.
En mai, le Tribunal judiciaire de Paris a jugé recevable un recours contre la société française TotalEnergies. Les plaignants – les organisations à but non lucratif Greenpeace, Les Amis de la Terre et Notre Affaire à Tous, soutenues par ClientEarth – ont affirmé que la campagne de changement d’image de TotalEnergies violait le droit de la consommation en induisant le public en erreur sur la réelle signification des projets de l’entreprise dans le contexte de crise climatique.
En juin, les campagnes de publicité de la société malaisienne Petronas, de l’Espagnole Repsol et de l’Anglo-Néerlandaise Shell ont été interdites par l’Advertising Standards Authority (ASA) au Royaume-Uni. Elles évoquaient leurs investissements dans les énergies renouvelables sans mentionner l’impact climatique global de leurs firmes respectives.
Toujours en juin, c’est l’organisme de surveillance de la publicité australien (Ad Standards Australia) qui a proscrit une publicité de l’Association australienne de production et d’exploration pétrolière (APPEA). Celle-ci déclarait que le gaz naturel était « 50 % plus propre », mais sans préciser clairement en quoi il était plus propre.
Le transport aérien n’est pas en reste. En mars 2023, l’Advertising Standards Authority (ASA) a interdit une campagne publicitaire de la compagnie allemande Lufthansa pour avoir fait des déclarations trompeuses sur les efforts menés par la société pour préserver la planète. L’ASA a estimé qu’il n’existait aucune technologie commercialement viable dans l’industrie aéronautique qui puisse étayer l’affirmation de la Lufthansa selon laquelle elle protégeait l’avenir du monde.
En septembre, sa filiale autrichienne, Austrian Airline, a été reconnue coupable d’écoblanchiment par un tribunal de Korneuburg pour avoir fait croire aux consommateurs qu’en utilisant des carburants d’aviation durables (sustainable aviation fuels – SAF), les voyages aériens « respectueux du climat » étaient désormais possibles.
L’agroalimentaire est également visé par des plaintes. En novembre, le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) a signalé aux autorités européennes les allégations commerciales trompeuses de Coca-Cola, Danone et Nestlé en matière de recyclabilité des bouteilles d’eau. Cette action est soutenue par les associations environnementales ClientEarth et ECOS.
En septembre, l’organisation écologiste Mighty Earth a déposé un mémoire auprès de la Security and Exchange Commission (SEC) concernant les « obligations vertes » du plus grand producteur mondial de viande, le Brésilien JBS. Mighty Earth affirme que ces obligations sont « trompeuses et frauduleuses ». Les émissions de GES de JBS ont augmenté ces dernières années et excluent le scope 3.
Dans le secteur de l’habillement, en mai, c’est Nike qui a fait l’objet d’une action de groupe devant un tribunal de district américain pour sa collection « Sustainability », dont 90 % n’étaient pas, contrairement à ce qui était annoncé, fabriqués avec des fibres recyclées, mais étaient principalement composés de matériaux synthétiques vierges néfastes pour l’environnement. Nike a lancé une campagne publicitaire corrective et a remboursé les consommateurs.
Enfin, en décembre, l’organisme de surveillance de la publicité de Singapour a interdit la publicité d’une entreprise d’électronique grand public de la cité-État qui prétendait que les consommateurs pouvaient « sauver la Terre » en achetant ses climatiseurs économes en énergie. C’est la première publicité à être proscrite pour écoblanchiment en Asie. Cette décision intervient un mois après que la Commission de la concurrence et de la consommation de Singapour et la Business School de l’université nationale de Singapour ont publié une étude portant sur 1 000 allégations de durabilité à propos de produits, trouvées sur des sites de commerce électronique. Le document rapporte que plus de la moitié de ces assertions étaient vagues et ne permettaient en aucun cas d’étayer les affirmations.