Les mesures prises par la Commission européenne pour apprécier la qualité des fonds en matière de durabilité sont insuffisantes

La qualité des fonds de placement en ce qui concerne la durabilité – autrement dit les fonds qui participent à l’essor d’un développement qui soit durable pour tous – est devenue un enjeu de premier ordre. Le nouveau règlement européen (Sustainable Finance Disclosure Regulation, SFDR) n’est malheureusement pas encore parvenu à clarifier le paysage. Dans un article publié le 10 mars 2023, l’agence Reuters a analysé la situation en s’appuyant sur les témoignages d’une trentaine de spécialistes.

Ces dernières années, la forte demande pour les « investissements verts » a conduit bon nombre de gérants de fonds à attribuer des propriétés durables – parfois imaginaires – à leurs produits. Entré en vigueur en mars 2021, le SFDR était censé mettre de l’ordre dans tout cela. En 2022, la Commission européenne a publié de nouvelles exigences techniques qui, en principe, devaient permettre de faire la distinction entre les fonds classés suivant l’article 8 (qui promeuvent des caractéristiques ESG) et ceux référencés sur la base de l’article 9, plus exigeant (ces fonds-là affichent un objectif d’investissement durable). Les obligations se sont encore renforcées en janvier 2023, en particulier sur le plan de la transparence.

La société américaine d’analyse pour les investisseurs Morningstar a montré qu’à la mi-janvier, plus de 100 des 891 fonds article 9 en Europe investissaient, d’une manière ou d’une autre, dans le charbon thermique (exploitation minière, production d’électricité, fourniture de services au secteur). Les gestionnaires se justifient en disant qu’il s’agit de sociétés qui se sont engagées dans une élimination progressive de l’utilisation de ce combustible, et que cette stratégie de gestion permet de faciliter une transition énergétique ordonnée et efficace. L’article 9 n’offre pas de règle explicite à propos du charbon thermique. De son côté, le fournisseur de données MSCI constate que la plupart des plus importants fonds article 9 ne sont actuellement pas alignés sur un objectif visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.

Pour l’instant, les mesures adoptées par la Commission n’ont pas permis de dissiper les confusions ni de déterminer ce qui constitue un investissement durable. En conséquence, de nombreux fonds ont « déclassé » une partie de leurs fonds article 9 en article 8. La tendance pourrait se poursuivre, d’une part parce que cela donne la possibilité de baisser les coûts de gestion pour des produits dont la « reconnaissance » est incertaine, et d’autre part, parce que cela restreint les risques d’accusation d’écoblanchiment. En l’état, la comparaison entre les fonds est donc particulièrement difficile, et cela ne contribue pas à améliorer la confiance du public à leur égard. La Commission a déclaré qu’elle allait procéder à une évaluation complète du SFDR.