Responsabilité et partage

Le 14 mai, Paul Hudson, directeur général de Sanofi, a adressé aux salariés de son groupe un courriel dans lequel il s’est excusé pour la vague d’indignation suscitée par ses propos, selon lesquels un éventuel vaccin contre le coronavirus mis au point par Sanofi serait d’abord distribué aux Etats-Unis. Il a également affirmé avoir été mal compris. Lors de l’assemblée générale de la société, le 28 avril, Serge Weinberg, son président, avait d’ailleurs indiqué « que la science ne [devait] pas pouvoir être confisquée par un pays ou l’autre à son seul profit direct ou indirect ». En tout état de cause, cet épisode mérite qu’on en tire des leçons générales. L’accès du plus grand nombre aux biens et services essentiels (ce qui ne doit pas être confondu avec la souveraineté nationale) est plus que jamais une priorité et doit être démontré, et pas seulement dans le secteur pharmaceutique interpellé, il est vrai, sur ce point depuis de très nombreuses années. De fait, il convient aussi de se poser la question de l’affectation des ressources. Il est en effet très tentant d’orienter la recherche et les investissements vers les marchés les plus porteurs et les plus rentables (mais aussi les plus concurrentiels). Enfin, l’éventualité d’un échec a également été évoquée dans cette affaire (en l’espèce, si les recherches n’aboutissent pas ou si la situation sanitaire ne nécessite plus de vaccin au moment de sa mise au point). Du coup, l’implication américaine permet de réduire le risque. Mais ne relève-t-il pas de la mission d’une entreprise de prendre des risques, de les justifier et de les assumer ? Tout comme elle peut en tirer des avantages.