Le 6 novembre 2023, l’association néerlandaise SOMO (Centre de recherche sur les sociétés multinationales) et la Commission des droits de l’Homme du Kenya (KHRC) ont rendu publique une étude révélant de graves abus sexuels et systémiques contre les femmes dans le cadre du projet de compensation carbone Kasigau (Kenya). Ce projet, garanti par le spécialiste de la certification de la compensation carbone Verra, est géré par la société américaine Wildlife Works.

Wildlife Works et ses bailleurs de fonds (parmi lesquels on peut trouver les entreprises françaises BNP Paribas et Kering) ont fait la promotion de Kasigau en des termes élogieux. Ils ont particulièrement vanté l’apport du projet en ce qui concerne l’autonomisation des femmes. Mais l’enquête de SOMO et de la KHRC, qui repose sur les témoignages de 31 employés et membres de la communauté locale (actuels et anciens), fait ressortir une autre réalité.

Le rapport fait état de femmes travaillant ou ayant travaillé à Kasigau, et qui ont été confrontées à des actes de harcèlement et à des agressions sexuelles de la part d’un petit groupe de seniors employés par Wildlife Works et de rangers pendant des années. Les organisations accusent Wildlife Works « d’avoir accepté une culture de graves abus et de lui avoir permis de persister chez Kasigau, et d’avoir vendu ses produits comme étant éthiques alors qu’ils ne le sont absolument pas ». Elles dénoncent aussi les carences du dispositif d’audit de Wildlife Works.

Après ces allégations, Verra a lancé une enquête. La société de certification a précisé que le projet ainsi que toute nouvelle émission de crédit seront suspendus jusqu’à ce qu’elle ait terminé son investigation. Quoi qu’il en soit, cette affaire apporte des arguments supplémentaires aux opposants aux mécanismes de compensation naturelle du carbone. Ces opposants sont de plus en plus nombreux à contester l’utilité de ce type de projet.