En Équateur, malgré les promesses des compagnies pétrolières, les torchères continuent à émettre des GES et à affecter la santé des populations

Cela fait des décennies que les compagnies pétrolières s’engagent à éliminer le brûlage de routine de leurs installations. Ces actions consistent à brûler le gaz naturel associé au pétrole extrait. Des progrès ont été faits pour diminuer ces opérations, mais elles sont loin d’être généralisées sur l’ensemble de la planète. Ces torchères représentent un gâchis considérable. De plus, elles alimentent la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et seraient l’une des principales causes du changement climatique, selon les données de la Banque mondiale. Elles sont également à l’origine de pollutions locales et de graves problèmes de santé : suie, contamination des cours d’eau et de l’air, émanations de benzène (une substance cancérigène)…

Aujourd’hui, on compte au moins 447 torchères actives en Équateur (dont 232 dans la province d’Orellana et 210 dans celle de Sucumbíos). Ces régions sont parmi les zones les plus polluées d’Amérique, et l’on y relève l’un des taux d’incidence de cancer le plus élevé au monde. En février 2020, neuf jeunes Équatoriennes âgées de 6 à 14 ans ont lancé une action juridique contre l’État équatorien pour demander l’élimination des « mecheros de la mort ». Elles ont invoqué une violation de leur droit à la santé, à l’eau, à la souveraineté alimentaire et à la vie dans un environnement sain et équilibré, inscrit dans la Constitution équatorienne. Le 26 janvier 2021, les juges de la Chambre multicompétente de la Cour provinciale de justice de Sucumbíos ont statué en faveur des fillettes et adolescentes. Il a fallu attendre le 29 juillet 2021 pour que la condamnation soit notifiée par le tribunal. Celui-ci a ordonné au ministère de l’Énergie de retirer les brûleurs près des zones habitées d’Orellana et de Sucumbíos dans les 18 mois. Ceux situés dans les régions plus éloignées pourront continuer à fonctionner jusqu’en 2030.

Malgré cela, la plupart des torchères sont encore en activité. Un responsable du ministère de l’Énergie a déclaré qu’un plan d’action était en cours pour les éliminer ; il a aussi précisé que les compagnies pétrolières étaient conscientes qu’elles devaient utiliser des technologies nouvelles et plus propres pour réduire leur impact environnemental. Certains mecheros ont été arrêtés, mais, dans le même temps, l’État a autorisé l’ouverture de nouveaux champs pétroliers, et donc la mise en service de nouveaux mecheros. Par ailleurs, l’ONG UDAPT (Unión de Afectados y Afectadas por las Operaciones Petroleras de Texaco) a détecté une augmentation de l’activité des mecheros qui se trouvent à proximité de ceux qui ont été éteints. Pour l’association, les sociétés pétrolières semblent faire affluer le gaz des torchères supprimées vers d’autres qui sont en activité. Le 19 mai 2022, la Commission Biodiversité de l’Assemblée nationale a reçu des représentants des communautés affectées par les activités pétrolières à Sucumbíos. Au cours de cette audition, Pablo Fajardo, président du collectif Eliminemos los Mecheros (Éliminer les Torchères), a souligné qu’il existait encore 47 brûleurs situés à 5 kilomètres des villes et 60 dans les agglomérations, malgré la décision de justice.