Les avantages climatiques revendiqués par les projets de compensation carbone forestiers certifiés par Verra contestés par une étude

Le très dynamique marché de la compensation carbone continue de faire l’objet de controverses. Pourtant, de nombreuses sociétés intègrent cette possibilité dans leurs dispositifs pour atteindre la neutralité carbone (le plus souvent à long terme). Ainsi, une enquête, menée auprès de 500 entreprises et publiée le 12 janvier 2023 par la We Mean Business Coalition (une alliance composée d’associations professionnelles et financières) et Conservation international (une organisation à but non lucratif dont la plupart des administrateurs sont issus du monde des affaires), affirme que 51 % des entreprises estiment que les crédits carbone leur permettront de faire face aux bouleversements climatiques de cette décennie. Par ailleurs, 89 % pensent que ces dispositifs constituent une part importante des efforts de décarbonation. Un tiers des entreprises investissent activement dans le marché volontaire du carbone, et 51 % le considèrent comme une option viable à l’avenir.

Cependant, les entreprises interrogées admettent aussi que l’écoblanchiment (44 %), le manque de réglementation et de transparence du marché (38 %), ou la qualité des crédits carbone (33 %) sont des obstacles à l’augmentation des investissements des sociétés dans ce domaine.

Le 17 janvier 2023, la société AiDash, spécialisée dans la surveillance des actifs grâce aux satellites et à l’intelligence artificielle, a publié une autre étude sur le sujet. Elle a examiné les réponses de plus de 500 responsables du développement durable à travers le monde. Cette analyse indique que 43 % des entreprises se servent de la compensation carbone pour les émissions difficiles à réduire. Mais le rapport souligne aussi que 41 % des répondants affirment ne pas utiliser de crédits carbone, invoquant un manque de confiance. Parmi les firmes qui ont recours à la compensation carbone, 43 % font appel à des agences de notation externes pour les certifier.

De nouveaux doutes concernant les crédits carbone ont été émis le 18 janvier 2023 par trois organes de presse : The Guardian, Die Zeit et SourceMaterial (une association de journalistes d’investigation). Ils ont publié les résultats d’une enquête de 9 mois sur les compensions carbone de Verra, le plus important organisme mondial de certification de crédits carbone. Ils affirment que plus de 90 % des crédits de compensation forestière tropicale délivrés par Verra ne représentent pas de véritables réductions de carbone et posent la question de « l’authenticité » des produits certifiés carboneutres. Verra approuve les trois quarts de l’ensemble des compensations volontaires dans le monde. Son programme de protection de la forêt tropicale constitue 40 % des crédits qu’il entérine.

Les organisations qui développent ce type de projet utilisent les règles de Verra pour calculer leurs prévisions du degré de déforestation qu’elles vont éviter. Ces prévisions sont ensuite vérifiées par un tiers accrédité par Verra, puis utilisées pour générer des crédits que des entreprises peuvent acheter pour compenser leurs propres émissions de carbone. Les journalistes du consortium ont inspecté les résultats de trois études scientifiques pour vérifier les résultats de plusieurs projets de compensation forestière (déforestation évitée) de Verra.

Deux études réalisées par une équipe internationale de chercheurs ont révélé que sur les 29 projets approuvés par Verra et pour lesquels une analyse plus approfondie était possible, 21 ne démontraient aucun avantage climatique. Pour 7 d’entre eux, le bénéfice était entre 52 et 98 % inférieur à ce qui était revendiqué en utilisant le système de Verra. Un seul faisait ressortir un impact climatique plus favorable (de 80 %). Par ailleurs, l’analyse d’une étude menée par une équipe de l’université de Cambridge a montré que pour 32 projets pour lesquels il était envisageable de comparer les affirmations de Verra aux résultats de l’étude, les scénarios prospectifs de référence de perte forestière semblaient surestimés d’environ 400 %. Cela revenait à surévaluer tout autant leurs avantages climatiques. Verra a vivement contesté les conclusions de ces enquêtes.