Les politiques de désinvestissement ne recueillent pas l’adhésion des personnalités politiques. Pourtant, elles pourraient procurer des avantages financiers aux contribuables

Le 25 mai 2022, le Sénat de Californie (à majorité démocrate) a voté en troisième lecture le projet de loi SB-1173. Celui-ci prévoit que le système de retraite des fonctionnaires de l’État (CalPERS) et celui des enseignants californiens (CalSTRS) se départissent de leurs participations dans les sociétés de combustibles fossiles. Le 26 mai, le projet a été présenté, en première lecture, à l’assemblée. Puis, le 2 juin, il a été soumis au Comité de la fonction publique et des retraites de ladite assemblée. Mais, le 20 juin – la veille de l’audience –, son président, le démocrate Jim Cooper, a décidé de le retirer de l’ordre du jour du comité. Pour lui, le moment n’est pas venu d’envisager des propositions de désinvestissement de nature politique qui nuiront à la sécurité financière des systèmes de retraite californiens alors que de nombreuses personnes peinent à joindre les deux bouts.

Les partisans d’une « approche politique » sont déçus et constatent que, même dans une Californie majoritairement démocrate où les personnalités politiques professent régulièrement le désir de lutter contre le changement climatique, le passage à l’acte est difficile. Ils remarquent aussi que Jim Cooper est l’un des rares démocrates de l’assemblée à bénéficier de dons de l’industrie des combustibles fossiles. Entre janvier 2021 et mai 2022, il a ainsi collecté de la part de ce secteur 36 350 dollars de dons, selon les données compilées par l’association Sierra Club. Cela étant, la coalition qui soutient le projet de loi sur le désinvestissement des pensions a déclaré qu’elle plaiderait pour l’introduction d’une législation similaire dès l’année prochaine. Jim Cooper, qui a remporté les élections pour le poste de shérif de Sacramento, ne devrait alors plus siéger à l’assemblée.

Parallèlement, une étude publiée le 7 juin 2022 montre qu’une politique bannissant les sociétés financières qui boycottent les « industries fossiles » peut coûter cher aux contribuables. Le document, intitulé Gas, Guns and Governments: Financial Costs of Anti-ESG Policies, a été rédigé par Ivan Ivanov, économiste principal à la section des institutions financières systémiques et des marchés de la FED (la réserve fédérale des États-Unis), et Daniel Garrett, professeur de finance adjoint à l’université Wharton de Pennsylvanie.

Les lois anti-ESG texanes SB13 et SB19 sont entrées en vigueur le 1er septembre 2021. Elles interdisent aux fonds de pension de l’État d’investir dans des sociétés financières qui pratiquent l’exclusion des entreprises impliquées dans les énergies fossiles, et aux « entités gouvernementales » de conclure des contrats avec des groupes qui « discriminent » l’industrie des armes à feu et des munitions. Les auteurs de l’étude montrent que les lois SB13 et SB19 ont entraîné la sortie brutale de l’État de cinq des plus importants souscripteurs d’obligations. Cela a causé un affaiblissement de la concurrence, une restriction de l’accès aux réseaux nationaux de placement d’obligations des grandes banques désormais absentes du marché et, de fait, un impact négatif sur le coût des obligations. Les chercheurs ont analysé 234 849 émissions obligataires produites par 37 516 municipalités texanes entre janvier 2007 et avril 2022. De septembre 2021 à avril 2022, ils estiment que les municipalités texanes ont généré 31,7 milliards de dollars d’obligations. Au cas où ces titres resteraient en circulation jusqu’à leur échéance, ils évaluent que le montant des intérêts supplémentaires payés par les contribuables pourrait atteindre 532 millions de dollars.