Dans certaines régions du monde, les sécheresses à répétition exacerbent les relations entre les populations et les entreprises de boissons

L’intensité et la précocité de la vague de chaleur qui a frappé la France ces derniers jours inquiètent et confirment, s’il le fallait encore, l’aggravation du dérèglement climatique. Ces événements se multiplient un peu partout dans le monde et poussent parfois les pouvoirs publics à prendre des mesures très douloureuses. La région de Monterrey au Mexique connaît depuis 2015 une sécheresse historique qui touche dramatiquement les ressources en eau. Cette situation a conduit les autorités de l’État de Nuevo León à rationner de façon draconienne l’accès à l’eau. Depuis le 4 juin 2022, la fourniture d’eau ne sera garantie que six heures par jour, de 4 à 10 heures du matin.

Une partie de la population accuse l’État du Nuevo León de faire passer avant elle les industries, car ces dernières ne sont pas concernées par les restrictions. Cinq grands groupes de sodas et de bières – parmi lesquels Heineken et Coca-Cola – extraient 16 % de l’eau allouée à l’industrie. En début d’année, les habitants du quartier Topo Chico à Monterrey ont mené une série d’actions à l’encontre de l’embouteilleur du même nom et marque détenue par le groupe Coca-Cola pour dénoncer sa mainmise sur l’eau disponible dans la localité.

Une autre entreprise est l’objet de la colère populaire : Bonafont, filiale du groupe français Danone installée dans l’État de Puebla. En mars 2021, les habitants de Juan C. Bonilla ont ainsi occupé l’usine d’embouteillage pour exiger qu’elle cesse de puiser l’eau. Ces protestations ont été relayées dans plusieurs pays d’Europe (France, Autriche, Allemagne, Italie…). En février 2022, les lieux ont été évacués par la garde nationale mexicaine. Le conseil municipal a alors annoncé que l’usine ne pomperait plus d’eau. Mais, en juin, elle était toujours en activité. La municipalité a répondu que seules des activités de distribution d’eau avaient été autorisées.

Cela étant, des membres des 20 municipalités de la région des Cholultecas ont affirmé qu’ils ne permettraient pas à la firme de fonctionner de nouveau. Pour eux, distribuer de l’eau implique qu’elle la prélève dans d’autres villes et la distribue à Juan C. Bonilla. Et cela sera incompatible avec leur souhait d’autodétermination et la souveraineté qu’ils estiment avoir sur leurs terres ancestrales. Quoi qu’il en soit, avec le changement climatique, la « bataille de l’eau » semble bel et bien prendre une nouvelle dimension.