Les assemblées générales des sociétés cotées sont devenues un espace de dialogue très intense. Un décryptage des messages est nécessaire

Les « batailles de mandat » lors des assemblées générales des compagnies pétrolières européennes et étatsuniennes ont commencé. Cette année, l’association néerlandaise Follow This a déposé pas moins de 10 projets de résolution à l’ordre du jour des assemblées générales de sociétés pétro-gazières. Elle propose aux actionnaires de voter en faveur d’objectifs de réduction des gaz à effet de serre de leur société. Deux résolutions ont été retirées avant leur présentation au vote. Six réunions se sont déjà tenues au 24 mai 2022. Les projets de résolution déposés par Follow This ont obtenu les scores suivants : Equinor ASA (3,57 %), BP Plc (14,86 %), Occidental Petroleum Corp. (16,51 %), Phillips 66 (35,63 %), ConocoPhillips (39,44 %), Shell Plc (20,31 %, au cours d’une assemblée très mouvementée).

En France, l’activité des actionnaires lors des assemblées générales des sociétés du CAC 40 est très fournie cette année. Elle se manifeste, notamment, à travers des questions écrites que la loi française autorise et encadre. Au 24 mai 2022, 27 réunions d’actionnaires se sont déjà déroulées. Le Forum pour l’Investissement Responsable a adressé une série identique de dix questions à l’ensemble des sociétés du CAC 40 dans les domaines environnemental, social et de gouvernance (ESG). Hormis le FIR, quarante actionnaires différents sont intervenus au cours de ces premières assemblées et ont posé 240 questions écrites (en 2021, 302 questions écrites avaient été posées au terme de la saison). Parmi les actionnaires particulièrement actifs cette année, on note l’association Reclaim Finance, l’association Peta (People for the Ethical Treatment of Animals), IPAC, la coalition d’investisseurs Climate Action 100+, la société de gestion Phitrust…

Avec un total de 142 questions écrites émanant de 17 actionnaires différents, les sociétés financières (Axa, BNP Paribas, Crédit Agricole, Société générale) ont été mises à l’honneur, notamment (mais pas uniquement) sur la question climatique. L’assemblée générale de BNP Paribas a été particulièrement chahutée. Une heure après le début de l’assemblée, des militants d’associations écologistes ont scandé des slogans pour protester contre la politique climatique du groupe lors de l’intervention de Laurence Pessez, directrice de la responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise. L’intervention de Laurence Pessez a été interrompue à plusieurs reprises et les protestations se sont poursuivies jusqu’à la fin de la réunion.

Avec la tenue de sept assemblées générales, la journée du 25 mai s’annonce intense. L’assemblée de TotalEnergies est particulièrement attendue. En effet, le groupe soumettra à l’avis de ses actionnaires son rapport « Sustainability & Climate – Progress Report 2022 » alors qu’il a, dans le même temps, rejeté l’inscription d’un projet de résolution sur la question climatique émanant d’une coalition d’actionnaires. Il est probable que, pour éviter tout débordement, l’entreprise procédera à un filtrage sévère à l’entrée de la salle Pleyel où se déroulera l’assemblée, quitte à prendre peut-être quelque liberté avec les droits fondamentaux des actionnaires.