Nouvelle action « juridique climatique » en Europe contre une entreprise. Formation d’une jurisprudence ?

Le 9 novembre 2021, Greenpeace Allemagne a engagé une action en responsabilité civile contre Volkswagen AG devant le tribunal régional de Brunswick. L’association reproche au constructeur automobile de ne pas avoir suffisamment décarboné son activité pour être conforme à l’objectif de 1,5 °C convenu à Paris en 2015. Elle estime que, pour respecter le scénario de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) qui permettrait de limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré, l’entreprise devrait réduire ses émissions de CO2 d’au moins 65 % avant 2030 (par rapport à 2018). Par ailleurs, les moteurs à combustion interne ne devraient représenter qu’un quart des voitures vendues par Volkswagen et devraient être complètement supprimés d’ici 2030.

Pour faire valoir la protection de leur liberté personnelle, de leur santé et de leurs droits de propriété, les plaignants se sont inspirés de l’action menée contre Shell devant les tribunaux néerlandais. En effet, en mai 2021, le tribunal de La Haye a décidé que les grandes entreprises avaient leur propre responsabilité climatique et a ordonné à Shell et à toutes ses filiales de faire davantage pour protéger le climat (IE n° 347). En tenant Volkswagen pour responsable des conséquences néfastes de son modèle économique sur le climat, Greenpeace s’appuie aussi sur la décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe d’avril 2021. Les juges avaient alors statué que les générations futures avaient un droit fondamental à la protection du climat. Les grandes entreprises étaient liées par cette exigence.

Pour Martin Kaiser, directeur exécutif de Greenpeace Allemagne, l’objectif de 1,5 degré ne pourra être atteint sans un changement de cap audacieux dans la politique et les affaires. De fait, les constructeurs automobiles comme Volkswagen doivent agir beaucoup plus rapidement pour éliminer progressivement les moteurs à combustion interne. Début décembre, le conseil de surveillance du groupe fixera la trajectoire de ses investissements pour les cinq prochaines années. Or, le plan de développement de l’entreprise comprendrait la production d’une nouvelle génération de moteurs à combustion interne nocifs pour le climat, que le fabricant aurait apparemment l’intention de vendre jusqu’en 2040 au moins.