Selon des économistes de premier plan, l’utilité économique des paradis fiscaux est injustifiée

A l’occasion du sommet anticorruption qui s’est tenu le 12 mai à Londres, 300 personnalités du monde économique, dont Thomas Piketty, Angus Deaton (prix Nobel d’économie 2015), Olivier Blanchard (ancien chef économiste et directeur des études au Fonds monétaire international), et des universitaires ont signé une lettre sommant les dirigeants de prendre des mesures pour mettre fin aux paradis fiscaux. Selon eux, leur rôle est inutile sur un plan économique, voire dangereux pour les Etats et surtout les plus pauvres d’entre eux : 150 milliards d’euros échapperaient aux pays en développement chaque année, un montant supérieur à l’aide mondiale au développement. Privés de ces rentrées fiscales, les Etats réduisent leurs dépenses sociales. L’ONG Oxfam rappelle ainsi que les pays africains sont privés de 12,4 milliards d’euros par an, une somme qui permettrait de sauver 4 millions d’enfants par an ou de scolariser l’ensemble des enfants du continent. Pour mettre un terme à l’évasion fiscale, ces personnalités proposent des dispositions comme le reporting pays par pays, une mesure qui sera prochainement débattue en France. A la suite de cet appel, douze pays, dont la Grande-Bretagne et la France, se sont engagés à tenir un registre identifiant les propriétaires des trusts et sociétés sur leur territoire. Les ONG se sont félicitées du nombre de pays qui se sont engagés à lutter contre l’évasion fiscale tout en regrettant l’absence des paradis fiscaux eux-mêmes lors du sommet. Par ailleurs, l’association Transparency International signale que le dirigeant d’un trust peut lui-même être un prête-nom ou une société offshore. Ce qui fait dire à Susana Ruiz, responsable des questions financières chez Oxfam Espagne, que « les fraudeurs peuvent encore dormir tranquilles ».